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et de mulâtresses étaient dits des cabougles. Musulmans et idolâtres étant polygames, les femmes d’un même mari étaient entre elles des matelotes, comme l’étaient, deux à deux, les Frères de la Côte, les terribles flibustiers.

Ne croyez point que ce brassage de races et de sangs fût le monopole des Antilles. En Guyane hollandaise, le capitaine Stedman discernait au premier coup d’œil une douzaine de tribus : les Cormentin, les plus appréciés de tous les nègres, à la triple balafre de chaque joue ; les Loango, de peu de valeur marchande, aux dés tatoués sur leurs flancs, leurs bras et leurs cuisses…

À quelle génération les sangs-mêlés pouvaient-ils rentrer dans la classe des blancs ? — À la question du gouverneur de Cayenne, le ministre répondit le 13 octobre 1766 : « Tous les nègres ont été transportés aux colonies comme esclaves ; l’esclavage a imprimé une tache ineffaçable sur leur postérité ; et par conséquent, ceux qui en descendent, ne peuvent jamais entrer dans la classe des blancs. S’il était un temps où ils pouvaient être réputés blancs, ils pourraient, comme eux, prétendre à toutes les places et dignités : ce qui serait absolument contraire aux constitutions des colonies. » Seuls, les indiens avaient accès aux charges et aux titres de noblesse, parce qu’ils étaient nés libres. Que de durs lendemains nous réservait cet ostracisme, qui allait jusqu’à refuser aux sangs-mêlés les titres de « sieur et dame » !