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du corps. Brisées, épuisées de leur suc, les cannes, devenues des bagasses, serviront à nourrir les porcs confiés aux nègres. Il faut maintenant surveiller les chaudières, où le sirop de sucre « bout extraordinairement », et le calmer en y pulvérisant avec un aspersoir des gouttelettes d’huile. Pour ne pas tomber dans le liquide en fusion, les malheureux esclaves qui n’ont que six heures de sommeil, font appel aux chansons pour se tenir éveillés. Purgerie, vinaigrerie et guildiverie ou usine à fabriquer le rhum, complètent l’établissement.

L’indigoterie est une industrie moins dangereuse. Jeté dans la trempoire de pierre où il est foulé aux pieds, puis pressé par un gros rouleau, l’indigo fermente et tendrait à brouer et mousser, si on ne jetait quelques cuillerées d’huile sur l’eau d’un bleu céleste. Il sèche ensuite dans un reposoir avant d’être taillé en tablettes. Joignez à ces manufactures familiales les caféteries qui n’étaient pas moins de 3.117 à Saint-Domingue, les 798 cotonneries qui étaient en aussi grand nombre que les sucreries, et enfin les cacaotières. Et vous aurez une idée de la main-d’œuvre noire sans cesse croissante qu’elles nécessitaient.

LE COMMANDEUR

La terreur d’une plantation, c’était le commandeur, le contre-maître des travaux agricoles. Esclave le plus souvent, choisi parmi les noirs les plus intelligents du domaine, c’était un despote. Les négresses ne le savaient que trop. Tous les