Page:La Roncière - Nègres et négriers, 1933.djvu/104

Cette page n’a pas encore été corrigée

des états de Guinée. Leur capital disparaît peu à peu. Aussi la traite des noirs serait-elle tombée si les habitants des côtes n’avaient communiqué leur luxe aux peuples de l’intérieur, desquels ils tirent aujourd’hui la plupart des esclaves qu’ils nous livrent. Cet épuisement a fait presque quadrupler le prix des esclaves. »

La hausse, quoi qu’en dise l’abbé Raynal, ne fut pas continue. Elle suivit les fluctuations de prix des denrées coloniales. La guerre, en ruinant le commerce des Antilles, amenait un abaissement du prix de la main-d’œuvre, qui remontait lors de la paix. La hausse n’eut point l’uniformité dont parle Peytraud, 1.160 livres la pièce d’Inde en 1750, 1.560 en 1770, 1.900 en 1778, 2.200 en 1785. Dans l’Ère des Négriers, apparaissent d’autres éléments d’une échelle mobile. Il y avait du reste aux Antilles des « magasins à Nègres » où le débit des esclaves échappait à l’encan.

Si la « pièce d’Inde », âgée de vingt ans environ, atteignait 2.400 livres, ou aux États-Unis 400 dollars et à Bahia jusqu’à la somme de 4.150 francs, elle valait plus cher si elle connaissait un métier. Tonnelier, charpentier, maçon, le nègre valait jusqu’à 2.500 florins dans la colonie hollandaise de Surinam, où les négresses doublaient aussi de prix quand elles étaient cuisinières, couturières ou brocheuses de bonnets. Il s’agissait là des « nègres à talents », qu’on payait parfois en nature douze milliers de sucre. La caisse de compensation, à laquelle étaient abonnés les planteurs, versait une indemnité pour chaque nègre « justicié » ou tué en marronage. Et