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maintenir que j’étais le seul de qui la maison eût joint ce même avantage à celui de la duché, et qui ne jouît pas de tous les privilèges que je demandais. Je demeure bien d’accord que pour me sacrifier on me couronna, et que témoignant d’en croire encore plus que je ne m’offrais d’en vérifier, on m’assura qu’on me satisferait dès cette heure-là même, si tout le monde voulait être aussi raisonnable que moi ; mais qu’ayant affaire à des gens qui ne se payent de rien que de ce qu’ils demandent, il fallait laisser venir un temps où on pût les obliger à entendre raison, et qu’en tout cas je serais le premier pour qui on ferait ce que j’avais désiré. Mais cette assurance-là fut encore éludée ; on supposa grossièrement une possession en faveur de ceux à qui on voulut donner effectivement ce qu’on s’était contenté de me promettre ; mes plaintes ne servirent qu’à me faire écouter de méchantes excuses, et, le passé me faisant juger de l’avenir, je crus qu’on ne manquerait jamais de prétextes pour m’outrager, jusques à ce que le Cardinal ne s’en laissa point à lui-même dans les promesses qu’il me fit la dernière fois que je quittai la cour pour aller en Poitou. Il s’engagea si distinctement à me faire précéder tous les prétendants au tabouret que la seule malice dont il me restait à le soupçonner était qu’il fût bien résolu qu’on n’en donnerait plus de son ministère, et tout ce que j’avais vu de lui n’avait pu encore me faire concevoir qu’il affectât de prendre des précautions, de peur qu’on ne doutât qu’il ne fût le plus infidèle de tous les méchants. Je m’en allai donc dans mon gouvernement avec la croyance de n’avoir rien à craindre que d’attendre peut-être inutilement la satisfaction qu’on me promettait, et