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avec raison qu’il se plaint de moi, et, par cette même raison, il ne doit avoir guère moins de gardes que cette couronne a de sujets, puisqu’il en faudrait faire le dénombrement pour savoir combien sa conduite a fait de malheureux. Mais, quoiqu’il n’ait jamais été soupçonné de trop de pudeur, je lui en crois assez pour n’entreprendre pas de nous débiter une si étrange doctrine ; et je prévois que pour renverser ce que je dis de lui, il prétendra qu’il lui suffit de ne l’avouer pas. À la vérité, s’il ne faut que nier les maux qu’on a faits pour en être justifié, on ne le convaincra pas même des plus évidents ; car c’est bien peu de lui avoir ouï dire, ou de lui avoir vu faire quelque chose, pour s’oser promettre de l’en faire demeurer d’accord ; et ce n’est qu’à se démentir soi-même, à toute heure, qu’on peut assurer que la hardiesse ne lui manque point. Mais veut-il nous persuader qu’il est innocent ? Qu’il nous remette en l’état que nous étions quand la paix générale fut entre les mains de M. Servien, et que M. le duc de Longueville, qui l’y avait mise, vit arracher des siennes la gloire d’un service qui n’aurait rien dû à ceux du premier comte de Dunois ; qu’il rende à cette monarchie la réputation que l’injuste opiniâtreté de nos armes lui a fait perdre, chez nos alliés mêmes, depuis ce temps-là ; et qu’il nous rende enfin tant de milliers d’hommes qu’une guerre