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Il s’y rencontroit de grands obstacles qu’il falloit nécessairement surmonter. La liaison particulière de M. le duc d’Orléans et de Monsieur le Prince, fomentée par tous les soins et par tous les intérêts de l’abbé de la Rivière, étoit un empêchement bien considérable. On ne pouvoit diviser ces deux princes, sans ruiner l’abbé de la Rivière auprès de M. le duc d’Orléans, et sans lui persuader[1] en même temps que Monsieur le Prince avoit manqué envers[2] lui en quelque chose d’assez important[3] pour lui faire naître le désir de le perdre ; et ce crime imaginaire n’étoit pas facile à supposer. Il falloit encore se réconcilier avec les Frondeurs, et que ce fut par un traité si secret que Monsieur le Prince n’en pût avoir de soupçon. Le peuple et le Parlement dévoient également l’ignorer aussi, parce qu’autrement les Frondeurs se seroient rendus inutiles à la cour, en perdant dans l’esprit du Parlement et du peuple leur crédit, qui n’étoit fondé que sur la créance[4] qu’ils étoient irréconciliables avec le Cardinal. Je ne puis pas dire si ce fut son habileté qui lui fit inventer les moyens qu’on employa contre la liberté de Monsieur le Prince ; mais au moins puis-je assurer qu’il se servit adroitement de ceux que la fortune lui présenta pour vaincre les difficultés qui s’opposoient à un dessein si périlleux. Enfin un nommé Joly[5], créature du coadjuteur de Paris, fournit de matière

  1. L’éditeur de 1804, et, d’après lui, ceux de 1826, 38, ont ainsi modifié le tour : « si on ne ruinoit et si ou ne lui persuadoit. »
  2. Vers. (Ms. H, réd. I.)
  3. En quelque chose assez considérable. (Ms. H. réd. I.)
  4. Et auroient perdu leur crédit vers le peuple, qui n’étoit fondé que sur l’impression qu’on y avoit. (Ms. H, réd. I.)
  5. Guy Joli, conseiller au Châtelet, neveu du chanoine Claude Joli, et un des syndics nommés par les rentiers de l’Hôtel de Ville pour veiller à leurs intérêts ; il est auteur de Mémoires que nous avons souvent occasion de citer.