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frère, était uni à lui, et il commandait l’armée d’Allemagne. Les vertus de ce grand homme sont plus connues par ses actions que par ce que je pourrais dire ici[1], et ce qu’il a fait depuis pour la gloire du Roi et de l’État doit effacer la faute que l’intérêt du duc de Bouillon et de sa maison et son mécontentement particulier lui firent[2] commettre en cette rencontre. Il entra dans les liaisons de son frère, et voulut employer l’armée qu’il commandait pour soutenir le parti de Paris ; mais ses troupes[3] suivirent leur devoir, et il fut contraint, pour chercher sa sûreté, de se retirer en Hollande[4]. Le ma-

    très-passionné pour la grandeur de sa maison. Retz dit dans le portrait qu’il trace de lui (tome II, p. 179) : « L’on l’a cru plus capable d’être à la tête d’une armée que d’un parti, et je le crois aussi, parce qu’il n’étoit pas naturellement entreprenant. Mais toutefois qui le sait ? »

  1. J’en pourrois dire ici. (1817, 26, 38.)
  2. Les éditions antérieures, qui omettent les mots : « et son mécontentement particulier », ont, par suite, fit, au lieu de firent.
  3. Ces troupes. (1817.)
  4. Février 1649- — Retz (tome II, p. 336 et 337) confesse qu’il n’a jamais pu savoir par quel mobile Turenne s’était donné à la Fronde. « Monsieur son frère et Madame sa belle-sœur, ajoute-t-il, m’ont juré, cent fois en leur vie, que tout ce qu’ils en savoient étoit que ce n’étoit point leur considération.... Il a fallu un mérite aussi éminent que le sien pour n’être pas obscurci par un événement de cette nature. » Voyez, dans les Lettres françaises de Mazarin (manuscrits de la blbliotbèque Mazarine, H, 1719, tome II, fol. 291 et fol. 297), deux lettres du Cardinal : l’une adressée à Turenne, à la date du 12 janvier 1649, lorsque le duc de Bouillon s’est déclaré pour le Parlement ; l’autre adressée à M. de Ruvigny, le 12 février, alors que Turenne vient de suivre l’exemple de son frère aîné. On lit dans cette dernière : « Si j’excuse en quelque façon le procédé que tient avec moi M. de Turenne, c’est que je reconnois tous les jours que Paris, en qui je mefiois entièrement, m’a trahi… Je crois que vous n’aurez pas manqué à faire connoître à mondit sieur de Turenne que, si on lui veut persuader que Monsieur le Prince manque au service de la Reine et dans l’amitié qu’il a pour moi, on le trompe, car jamais il n’a fait paroitre tant de chaleur que dans celle-ci. J’ai voulu vous