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parlé[1]. La manière qui le fit découvrir est encore douteuse, et, sans m’arrêter aux divers soupçons qu’on a eus de la fidélité ou du secret de ceux qui le savaient, il vaut mieux s’attacher à une opinion innocente, et croire que ce traité fut trouvé dans la malle du courrier d’Espagne, que l’on ouvre presque toujours en passant à Paris. M. de Thou[2] n’en avait encore aucune connaissance, lorsqu’il vint me trouver de la part de la Reine pour m’apprendre sa liaison avec Monsieur le Grand, et qu’elle lui avait promis que je serais de ses amis ; M. de Thou me fit aussi beaucoup d’avances de Monsieur le Grand, et je me trouvai dans ses intérêts sans l’avoir presque jamais vu. Je ne dirai point ici la suite malheureuse de leurs projets : on la sait assez. La mort de Monsieur le Grand et de M. de Thou ne ralentit pas les poursuites du Cardinal contre tous ceux qui avaient eu part au traité d’Espagne. Le comte de Montrésor avait été accusé par Monsieur de l’avoir su, et il se vit contraint de sortir du Royaume ; il en chercha longtemps inu-

  1. On peut suppléer à la brièveté du récit de la Rochefoucauld au moyen des Mémoires de Montrésor, p. 337 et suivantes, de ceux de Mme de Motteville, tome I, chapitre iv, de la Relation de Fontrailles, ami et conseil de Cinq-Mars, à la suite de laquelle Petitot donne le texte du traité conclu avec l’Espagne le 13 mars 1642, et celui d’une lettre de M. de Marca à M. de Brienne sur ce qui s’est passé à l’instruction du procès de Cinq-Mars et de de Thou.
  2. François-Auguste de Thou, grand maitre de la librairie du Roi, conseiller d’Etat, fils de Jacques-Auguste de Thou, l’historien. Mme de MotteviIle dit (tome I, p. 74) « que M. de Thou fut aussi arrêté pour avoir su le secret du traité d’Espagne, non pas comme participant à ce dessein, car il l’avoit même tout à fait désapprouvé, mais seulement pour l’avoir su par confiance et pour ne l’avoir pas révélé, et pour principale raison parce qu’il n’étoit pas ami du cardinal de Richelieu. » Voyez, dans les Archives curieuses de l’hisloire de France (2e série, tome V, p. 295-301), Interrogatoire fait à Monsieur le Grand et à M. de Thou, prisonniers au château de Pierre-Encise à Lyon, le 9 septembre 1642 , et leur Confrontation.