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SUR LA ROCHEFOUCAULD

cet état-major choisi avec lequel Condé entreprend de traverser la moitié de la France, pour aller rejoindre sur la Loire l’armée du duc de Nemours. Ce voyage, dont il faut lire la relation, surtout dans les Mémoires de Gourville[1], fut plein d’émotions et de vicissitudes. Il s’acheva toutefois sans accident grave le 1er avril, et dès lors Condé, ayant pris le commandement en chef de l’armée, se trouva en face de Turenne. Le combat indécis de Bléneau, où ces deux illustres antagonistes rivalisèrent de talent et de coup d’œil, est demeuré fameux dans l’histoire ; la Rochefoucauld et son fils à peine adolescent s’y distinguèrent au premier rang[2]. « Il y a très-bien fait, » dit Monsieur le Prince, en parlant du père, dans une lettre qu’il écrivit le lendemain à Mademoiselle[3]. Quelques jours après (11 avril), Condé, toujours accompagné de la même escorte, était reçu triomphalement dans Paris, que la cour avait quitté depuis plus de trois mois. Si l’espérance de Monsieur le Prince, en rentrant dans la capitale, avait été de réunir en un faisceau les divers partis de la Fronde, il dut renoncer bientôt à cette illusion. Le Parlement avait beau mettre à prix la tête de Mazarin, chaque jour de répit profitait à la fortune du Cardinal et nuisait à celle des Frondeurs. À la première fumée d’enthousiasme avec laquelle les bourgeois avaient salué la venue du prince succédèrent des cabales et des intrigues, toutes nées de la lassitude de la guerre et du désir d’un accommodement. Condé lui-même, une fois à Paris, se prit à y respirer comme un


    faire hardiment son éloge à l’occasion de sa conduite factieuse, lie qualifiant ses rebellions que de retraites de la cour. On y lit deux ans de suite (1651 et 1652): « Le duc de la Rochefoucauld et prince de Marcillac, gouverneur de Poitiers ; il se retira de la cour lorsque Messieurs les Princes furent arrêtés prisonniers, fut à la guerre de Bourdeaux, avec plusieurs gentilshommes de ses amis, où il fit paroître sa sagesse et sa valeur en plusieurs occasions, et depuis la liberté de Messieurs les Princes, il est revenu à la cour, et s’en est encore retiré depuis. » Comparez ci-dessus, p. xli, note 2.

  1. Pages 254-261.
  2. Mémoires, p. 366-373. Voyez aussi Mme de Motteville, tome III, p. 473, et Montglat, tome II, p. 333.
  3. Mémoires de Mademoiselle, tome II, p. 39.