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SUR LA ROCHEFOUCAULD

meurée célèbre : « Tout arrive en France. » Puis il avait regagné les ruines de Verteuil, le 6 octobre 1650. Ni Lenet, ni Gourville ne parlent dans leurs Mémoires du retour secret à Paris et de ces visites nocturnes, que Mme de Motteville elle-même (tome III, p. 266) dit ne tenir que de la bouche de la Rochefoucauld. Gourville a seulement cette phrase (p. 234) : « Je m’en retournai à Paris (1651) ; et M. de la Rochefoucauld y étant revenu quelque temps avant la liberté de Monsieur le Prince, alla au-devant de lui jusqu’à sept ou huit lieues du Havre. »

Toute cette diplomatie fut cependant en pure perte. Mazarin, qui sans doute présumait encore trop de ses propres forces, ne voulut point contracter d’engagement formel sur l’article fondamental, la liberté des Princes. Il se méfiait d’ailleurs de la franchise du négociateur. On lit dans les Mémoires de Lenet[1], qui, le soir de l’entrevue de Bourg dont nous venons de parler, eut un entretien particulier avec le Cardinal : « Il passa à me parler de la duchesse de Longueville et du duc de la Rochefoucauld, comme de gens dont il lui seroit malaisé d’avoir l’amitié, parce qu’ils n’en avoient, disoient-ils, que l’un pour l’autre. » Ainsi le duc se trouva rejeté forcément vers ceux des Frondeurs qu’il n’aimait point ou qu’il n’aimait plus, Châteauneuf, Retz, Mme de Chevreuse, auxquels le duc d’Orléans venait de se rallier. Quant à Mazarin, il paya cher cette défaillance de son habileté ordinaire : déclaré par le Parlement ennemi de l’État, il fut contraint de sortir, d’abord de Paris, puis du Royaume, abandonnant ainsi à elle-même la Reine régente. La Rochefoucauld fut chargé en personne de porter l’ordre de délivrance au Havre-de-Grâce : triomphe sans pareil, si le malicieux Cardinal ne l’en eût frustré au passage, en ouvrant lui-même aux Princes la porte de leur prison[2].

  1. Page 416.
  2. Mémoires, p. 233-235. Voyez aussi le court résume intitulé livre second, dans l’édition Michaud des Mémoires de Lenet (p. 521-525) ; les Mémoires de Mme de Motteville, tome III, p. 305 ; et ci-après, à l’appendice v, 5o (p. cvii), le texte de l’ordre, du 10 février 1651, envoyé « à M. de Bar pour lui dire de laisser parler à Messieurs les Princes les sieurs duc de la Rochefoucauld, président Viole et Arnaud. »