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396 APPENDICE. refuser ; mais ce qui m’a engagé à vous le promettre me devroit em- pêcher de vous le tenir ; car je vois par là que vous êtes si délicate en agrément qu’il faut qu’une chose, pour être à votre goût, soit excel- lente et d’un prix bien rare. Aussi, Madame, je ne vous écris pas tant par l’espérance de vous plaire que par la crainte de vous déso- béir ’, et peut-être qu’il seroit encore de plus mauvais air de vous manquer de paiole que de ne vous rien dire d’agréable. Quoi qu’il eu soit, vous me donnez le moyen de me sauver de l’un et de l’autre, en m’ordonuant de vous rapporter la conversation que j’eus avant- hier avec M. de la Rochefoucauld ; car il parla presque toujours, et vous savez comme il s’en acquitte ^. Nous étions dans un coin de chambre, tète à tête, à nous entretenir sincèrement de tout ce qui nous venoit dans l’esprit. Nous lisions de temps en temps quelques rondeaux , où l’adresse et la délicatesse s’étoient épuisées, tu Mon Dieu! me dit-il, que le monde juge mal de ces sortes de beautés! et ne m’avouerez-vous pas que nous sommes dans un temps où l’on ne se doit pas trop mêler d’écrire? » Je lui répondis que j’en demeurois d’accord, et que je ne voyois point d’autre raison de cette injustice, si ce n’est que la plupart de ces juges n’ont ni goût ni esprit, a Ce n’est pas tant cela, ce me semble, reprit-il, que je ne sais quoi d’en- vieux et de malin qui fait mal prendre ce qu’on écrit de meilleur. — Ne vous l’imaginez pas, je vous prie, lui repartis-je, et soyez as- suré qu’il est impossible de connoître le prix d’une chose excellente sans l’aimer, ni sans être favorable à celui qui l’a faite. Et comment peut-on mieux témoigner qu’on est stupide et sans goût, que d’être insensible aux charmes de l’esprit? — J’ai remarqué, reprit-il, les défauts de l’esprit et du cœur de la plupart du monde, et ceux qui ne me connoissent que par là pensent que j’ai tous ces défauts, comme si j’avois fait mon portrait^. C’est une chose étrange que mes actions et mon procédé ne les en désabusent pas. — Vous me faites souvenir, lui dis-je, de cet admirable génie qui laissa tant de beaux ouvrages^, . Le passage qui précède, depuis : « mais ce qui m’a engagé à vous le promettre, » avait été supprimé par Duplessis; nous le rétablissons d’après l’édition originale. . « Je n’ai jamais vu, dit Mme de Sévigné en parlant de la Rocliefoucauld (Lettres, tome VI, p. 232), un homme plus aimable dans l’envie qu’il a de dire des choses agréables. » — Rapprochez de hi maxime loo. . Voyez, ci-dessus, le Discours sur les Maximes, p. 36" ; la Lettre de la princesse de Guymené, p. 372; et le Projet d’article pour le Journal des Sa- vants , par Mme de Sablé, p. 392. — Ce passage indiquerait que cette con- versation est postérieure, au moins, à la i" édition des Naximes (i665). . Epicure. Ce philosophe a été un des plus féconds écrivains de l’anti- quité. Le nombre des volumes qu’il avait composés ne s’élevait pas à moins de trois cents, d’après le témoignage de Diogène de Laèrte, qui énumère ses prin- cipaux ouvrages. On sait qu’il n’en est à peu près rien parvenu jusqu’à nous. — Comme Saint-Evremond et tant d’autres hommes du monde d’alors, le che-