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NOTICE BIOGRAPHIQUE

la suite d’un interrogatoire en règle, la Reine consentit à faire amende honorable, et Mme d’Aiguillon acheva d’apaiser le Cardinal son oncle. Mais le départ précipité de Mme de Chevreuse, qui était du complot, et qui prit l’alarme sur un malentendu, vint gâter, au dernier moment, les affaires de Marcillac. Quelque mystère que celui-ci y eût mis, le Cardinal connut la part qu’il avait eue à la fuite de la duchesse. Mandé à Paris pour rendre compte de sa conduite, le favori de la Reine ne craignit pas de heurter Richelieu par ses réponses, et le Ministre, impatienté plus encore qu’irrité, l’envoya pour huit jours à la Bastille[1]. « Ce peu de temps que j’y demeurai, dit la Rochefoucauld avec une exagération égoïste qui fait sourire, me représenta plus vivement que tout ce que j’avois vu jusqu’alors l’image affreuse de la domination du Cardinal ; » et il se félicite d’être sorti si vite de prison « dans un temps où personne n’en sortoit[2]. » C’est que Richelieu l’avait mesuré

  1. Nous lisons dans les Mémoires de Richelieu (tome III, p. 282, édition Michaud et Poujoulat) : « Le président Vignier interrogea le prince de Marcillac, qui fut ensuite mis dans la Bastille, pour les fortes apparences qu’il y avoit qu’il avoit eu connoissance de son dessein (le dessein de Mme de Chevreuse) et qu’il l’y avoit assistée ; mais, à peu de jours de là, la bonté du Roi fut telle qu’il lui pardonna et le fît remettre en liberté. » — Sur toute cette aventure de la fuite de Mme de Chevreuse, voyez, outre les Mémoires, p. 32-40, l’appendice i de notre tome III, lettre 3 (avec les annexes A et B), et lettre 4, p. 231-243.
  2. Mémoires, p. 38 et 40. — Voici l’ordre d’emprisonnement envoyé par le comte de Chavigny :

    « À M. du Tremblay, gouverneur de la Bastille, pour recevoir à la Bastille M. de Marcillac. — Monsieur, le Roi ayant commandé à M. de Marcillac d’aller à la Bastille pour avoir fait quelque chose qui lui a déplu, je vous écris le présent billet de la part de Sa Majesté, afin que vous le receviez. Vous aurez soin, s’il vous plaît, de le bien loger et lui donner la liberté de se promener sur la terrasse. Je suis, Monsieur, votre très-humble serviteur. Chavigny. — À Ruel, ce mardi 29 octobre 1687. »

    (Dépôt des affaires étrangères, France, tome 86, fol. 138.)

    V. Cousin, qui transcrit également cet ordre dans l’appendice du chapitre iii de Madame de Chevreuse (p. 435), fait remarquer avec raison que, Marcillac n’étant parti pour Paris qu’après le 12 no-