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88 APPENDICE DU TOME I. toute bonne qualité, que d*étre hardi et insinuant. Mais on doit être encore plus surpris que Mademoiselle ait pris cette chimérique résolution par un esprit de servitude et parce que Puyguilhem étoit bien auprès du Roi; Tenvie d*être femme d*un favori lui tint lieu de passion, elle oublia son âge et sa naissance, et, sans avoir a amour% elle fit des avances à Puyguilhem qu*un amour véritable feroit à peine excuser dans une jeune personne et d’une moindre condition. Elle lui dit un jour qu il nV avoit qu’un seul homme qu’elle put choisir pour épouser. Il la pressa de lui apprendre son choix ; mais n’ayant pas la force de prononcer son nom, elle voulut récrire avec un diamant sur les vitrés d’une fenêtre. Puy- guilhem jugea sans doute ce qu’elle alloit faire, et espérant S eut-être qu’elle lui donneroit cette déclaration par écrit, ont il pourroit faire cpielque usage, il feignit une délicatesse de passion qui pût plaire à Mademoiselle, et il lui fit un scru- pule d’écrire sur du verre un sentiment qui de voit durer éter- nellement. Son dessein réussit comme il desiroit, et Made- moiselle écrivit le soir dans du papier : « C’est vous. » Elle le cacheta elle-même; mais, comme cette aventure se passoit un jeudi et que minuit sonna avant que Mademoiselle pût donner son billet à Puyguilhem , elle ne voulut pas paroitre moins scrupuleuse que lui, et craignant que le vencuredi lie fût un jour malheureux, elle lui fit promettre d’attendre au samedi à ouvrir le billet qui lui devoit apprendre cette grande nouvelle’. L’excessive fortune que cette déclaration fisdsoit pbysionomie htate, pleine d*esprit, qai imposoit, mais sans agrément dans le visage. » Pour Tesprit, malgz^ ce qu^il yient de dire de la physionomie, il ajoute : « sans aacon ornement ni agrément dans Tesprit, » ee qni n’est pas, il est vrai, la même chose que «Twi esprit médiocre» « C’est un des plus petits hommes, pour Tesprit aussi bien que pour le corps, que Dieu ait jamais fait, » dit Mme de SéWgné en 1689, tomeVUI, p. 45i* I. Segrais dit encore plus (p. 34) : « C’est par foiblesse qu’elle s*attacha à M. de Lanztm. Elle n’airoit pas la moindre inclination pour lui. EUe le regardoit seulement par le grand crédit qu’il avoit à la cour. » Le marquis de la Fare s’exprime ainsi : « Mademoigelle devint passionnée de Lauzun, autant, je crois, parce qu’il étoit favori du Roi que par les qualités aimables qui étoient médiocres en lui et en petit nombre. » [Mémoires^ édition Michaud, p. 371.) Cette dernière opinion, avec les mots : « devint passionnée, > se concilie mieux, ce semble, avec ces pages, qui pa- raissent dncères, où Mademoiselle raconte que, l’envie de se marier l’ayant prise^ elle s’aperçut que « c’étoit M. de Lauzun qu’elle aimoii^ qui s’étoit glissé dans son cœur, etc. » (Tome IV, p. 9a et suivantes.) a. Toute cette histoire du billet est aux pages 172-174 du même tome IV, avec ces deux différences : Mademoiselle ne veut pas écrire le nom avec un diamant c sur es vitres d’une fenêtre, » mais, ce qui est pins vraisemblable, elle dit à Lauzun ; « Je m’en vais sou£Qer contre le miroir et je l’écrirai. » D’autre part, elle n’écrit pas le Jeudi (ao noveutbiej^ mats le vendredi (ai) : les dates se déduisent de la suite des