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vent, comme la concurrence interindividuelle est cause des procès, de véritables guerres privées, de la plupart des haines publiques et privées, des maux qui suivent.

L’oisiveté sera supprimée. Pour calculer l’épargne de travail social ainsi réalisée, il ne faut pas comparer seulement dans la société présente le nombre des oisifs au nombre total des citoyens ; il faut ajouter au nombre des oisifs le nombre de tous les citoyens qui travaillent dans la société présente à pourvoir au luxe individuel des oisifs.

La production sera centralisée autant qu’il est possible ; or, si la centralisation est mauvaise pour la vie intérieure des hommes et pour le travail supérieur de l’humanité, surtout pour l’art et pour la philosophie, elle est bonne pour la production sociale, parce qu’elle permet aux citoyens de faire mieux et plus vite le travail social de production, et, justement ainsi, d’être mieux et plus tôt libres pour leur vie intérieure et pour le travail supérieur de l’humanité. La cité socialiste organisera la culture intensive, l’industrie intensive, centralisera le commerce, de manière à tirer de la matière qui est proposée à l’activité humaine le plus des meilleurs moyens de consommation.

À l’égard des citoyens, le régime socialiste aura sur la société présente au moins deux avantages :

Il établira entre et pour tous les citoyens une fraternité, une solidarité réelle et vivante ; une justice, une égalité réelle et vivante ; une liberté réelle, au lieu d’une fraternité fictive ; d’une justice fictive ; d’une liberté fictive.

Il amortira autant que possible les à-coups individuels. Dans la société présente on laisse les malheurs individuels tomber de tout leur poids sur ceux des citoyens qui se trouvent au droit, et qui souvent en sont écrasés. Et comme il y a, malgré tout, en fait, des solidarités individuelles indéfinies, ces malheurs ont des répercussions indéfinies, incalculables. Si bien que le progrès même est, en fin de compte, onéreux. Par exemple, quand on invente une machine qui supprime la moitié du travail dans un métier, les consommateurs, en général, en tirent un certain bénéfice parce que les prix baissent, mais la moitié des producteurs sont mis à pied, et ces malheurs individuels ont le plus souvent de telles et si lointaines répercussions que l’ensemble du mal ainsi causé aux citoyens est pire que n’est avan-