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15 novembre, 1919.
LA REVUE MODERNE
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S’UNIR POUR GRANDIR


Notre pays aspire à de hautes destinées.

C’est son droit impérieux. Mais pour atteindre aux sommets convoités, une union s’impose entre les races, les classes, les groupes.

Tous les Canadiens, certes, ont au cœur l’amour et la fierté de la patrie. Leur manière de comprendre ce sentiment a pu jusqu’ici varier, mais l’heure ne saurait plus tarder de l’exprimer par un seul et unique geste.

Ce geste, il faut le préparer.

Tous ceux qui veulent la grandeur et la prospérité de leur pays sentent, devant les exigences du monde nouveau qui s’inaugure, combien nous avons besoin de grouper les énergies et les vaillances pour composer l’élite qui doit orienter nos ambitions nationales. Mais cette élite existe-t-elle ?

Nos hommes instruits et capables de diriger notre éducation nationale, ne sont-ils pas disséminés dans tous les groupes ? Et ces groupes ne sont-ils pas même souvent de simples factions politiques ? Il n’y a pas de centre intellectuel où toutes les classes se joignent, où toutes les idées s’échangent, un centre enfin où l’on apprend à se connaître et à se respecter, en dépit des abîmes qui peuvent nous séparer. L’intérêt national ne devrait-il pas déterminer un effort en commun, où seraient oubliées les haines de race, où seraient abolies les dissensions anciennes, et où l’on apprendrait vraiment à se connaître et à se comprendre. La fondation de ce centre de pensée canadienne s’impose, et la Revue Moderne veut aider à sa création.

Elle ouvre donc largement ses colonnes à tous ceux qui sont appelés, par leur talent et leurs études, à jouer le rôle dans la vie canadienne, de diffuser des idées, de promouvoir des progrès, et d’orienter des mouvements. Elle veut ainsi former une opinion saine et juste qui professera le mépris du préjugé, et répudiera toute propagande de haine et de fanatisme.

Il n’y a pas à se le dissimuler, un esprit nouveau nous anime. Ce n’est pas en vain que la guerre nous a tué nos enfants pour un idéal de justice et de liberté. Cet idéal qui s’empare de nos consciences, nous inculque une mentalité plus généreuse, plus salutaire, plus humaine, parce que plus fraternelle.

Déjà, chez-nous, s’affirme un besoin d’oublier les discussions anciennes, d’abolir les vieilles rancunes, d’effacer les mauvais souvenirs, pour commencer une vie nationale, inspirée uniquement des intérêts canadiens, des progrès canadiens, des demains canadiens.

L’avenir, devant nous, s’ouvre magnifique ; il serait criminel d’oublier que nous habitons un grand pays, et que nous pouvons devenir un grand peuple.

Certes, Latins et Saxons qui se partagent ce pays-ci, ont de légitimes fiertés, et d’imprescriptibles héritages. Ni les uns ni