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sincères… Mais ce n’était pas le moment de s’arrêter à cette impression. Bientôt toute la troupe fut dehors, Else et Lintzow en tête, se dirigeant vers le sommet, d’où l’on avait la plus belle vue.

On traversa d’abord le jardin du presbytère, où des violettes croissaient en masse à l’ombre des grands arbres. C’était la mère d’Else qui les avait plantées.

— Ah ! des violettes ! Quel bonheur ! s’écria l’aînée des demoiselles Hartwig. Monsieur Lintzow, cueillez-m’en donc un bouquet.

Le jeune homme qui, depuis quelques instants, s’évertuait à trouver le ton sur lequel on pouvait parler à Else, crut remarquer que la jeune fille avait entendu avec déplaisir les paroles de Mlle Frédérique.

— Les violettes sont vos fleurs favorites, lui dit-il à demi-voix.

Surprise, elle leva les yeux vers lui : comment pouvait-il savoir cela ?

— Ne croyez-vous pas, mademoiselle Hartwig, reprit Max Lintzow, ne croyez-vous pas qu’il vaudrait mieux n’en cueillir que ce soir ? Elles seraient plus fraîches.

— Comme vous voudrez, répondit brièvement celle-ci.

— Elle les oubliera probablement d’ici là, fit-il, paraissant se parler à lui-même.

Mais Else l’entendit et se demanda encore une fois quel plaisir il pouvait trouver à protéger ses violettes, au lieu de les cueillir pour la belle demoiselle.

Après avoir admiré quelque temps la vue splendide qu’ils avaient sous les yeux, ils descendirent la colline par un sentier qui menait à la mer.

La conversation s’était animée. Tout d’abord, Else s’était sentie un peu dépaysée. Il lui semblait que ces gens de la ville parlaient une langue inconnue. Parfois aussi, elle trouvait qu’ils riaient pour des riens, et elle, de son côté, avait souvent envie de rire de leurs étonnements et de leurs ignorances.