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L’ŒUVRE DE MASCART

Cette mésaventure suffit peut-être à expliquer pourquoi je n’ai pas été des premiers adhérents à la Société des Électriciens. C’est seulement en 1886, à la mort de Blavier, que M. de Nerville, qui dirigeait avec tant de dévouement l’embryon de laboratoire installé rue Saint-Charles, vint me demander d’entrer à la Société pour l’aider dans la tâche ingrate qu’il avait acceptée.

Mon premier soin, comme président, fut de remanier les statuts, avec l’aide du Comité d’administration, dans l’esprit de ceux qui ont assuré la prospérité de la Société de Physique.

La Société obtint du Conseil municipal l’attribution d’une partie des locaux de l’ancien Collège Rollin pour l’installation du laboratoire. Mais la Ville de Paris ne tarda pas à avoir regret de cette concession et nous proposa d’accepter en échange un terrain nu situé rue de Staël. Ici se place une anecdote qui mérite d’être rappelée.

Au Collège Rollin il y avait des bâtiments utilisables. Tout était à faire rue de Staël. Dans une séance de la Commission du laboratoire réunie à cet effet, M. Fontaine me demanda si l’emplacement de la rue de Staël me paraissait préférable au point de vue pratique.

Sur mon observation que j’étais fort embarrassé de donner un avis ferme parce qu’il devait en résulter un surcroît de dépenses d’au moins 80 000 francs, il me répondit qu’on trouverait l’argent, à la condition que j’accepte de tenir l’escarcelle. Voilà comment je devins frère quêteur. Entrant aussitôt en fonction, je fis passer à mon voisin de droite un bout de papier intitulé : « Souscription du Laboratoire. »

En le surveillant d’un regard oblique, je le vis inscrire, à la suite de son nom, un 2 suivi de plusieurs zéros, en vérifier soigneusement le nombre et en ajouter un quatrième, formant un total de 20 000 francs.

C’était Paul Lemonnier, ancien président de la Société, qui ébréchait ainsi sa modeste fortune en faveur de notre Institution. Lemonnier était un noble caractère, aimé de tous, et nous devons un souvenir reconnaissant à sa mémoire.

Ce début inspirait confiance, et nous récoltions, séance tenante, la somme de 45 000 francs. Une suite de sollicitations amena progressivement la souscription à plus de 100 000 francs.

J’appris plus tard d’un ami que je puis citer, M. Pallain, aujourd’hui gouverneur de la Banque de France, qu’il restait encore au Ministère des Finances des sommes importantes provenant du legs Giffard. Nous fîmes une demande de 100 000 francs, et, au bout de quelques jours, je me rendis au cabinet du Ministre. Pour démontrer que notre intervention rentrait bien dans les intentions du légataire, je lui racontai ma conversation avec Dumas, en ajoutant qu’il devait