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RÔLE DES EXCURSIONS DANS L’ENSEIGNEMENT DES SCIENCES

la transformation incessante de la croûte terrestre ; les diverses formes d’érosion, les effets des eaux de ruissellement, les rapports qui existent entre l’histoire passée et la disposition actuelle des éléments, seraient de la sorte presque immédiatement saisis. Est-il nécessaire pour se faire une idée de ce qu’est une cascade, des conditions dans lesquelles elle s’établit, d’aller au Niagara et ne peut-on, avec le moindre filet d’eau courante, faire comprendre à des enfants, par leurs propres recherches, pourquoi il s’en constitue de minuscules en des points déterminés et quels sont les effets qui en résultent ? La moindre carrière attentivement examinée permettra de toucher du doigt les phénomènes qui ont présidé à la formation des diverses couches des fossiles, si imparfaits qu’ils soient, recueillis par les élèves eux-mêmes, leur en apprendront plus que les plus beaux échantillons soigneusement montés, et surtout les feront réfléchir davantage.

Qu’il me soit permis à cette occasion de rappeler un souvenir personnel d’écolier ; quand j’étais en quatrième notre professeur nous emmena un dimanche dans les carrières d’Issy et de Meudon ; je n’oublierai jamais le charme de cette promenade et je suis convaincu qu’il en est de même pour tous ceux de mes camarades qui y prirent part ; je dois avouer à ma grande honte que je serais bien embarrassé de me rappeler quels sont les faits que contenait le cours ; je vois au contraire comme s’il s’agissait d’hier les diverses couches superposées de chacune des carrières visitées, et je me souviens de l’impression profonde que nous ressentîmes devant un superbe Cérithe géant à l’extraction duquel il nous fut donné de procéder. Cette classe en plein air, la seule qui nous ait véritablement profité, n’eut pas de lendemain ; j’ai appris depuis par mon premier maître en histoire naturelle que l’administration avait fort peu encouragé ce louable essai.

On comprend combien il serait facile de multiplier les exemples, qui varieront nécessairement d’une région à l’autre quant à la nature des objets observés, mais qui partout auront la même valeur pour l’éducation des sens. L’étude des plantes se prêterait aussi merveilleusement à ce genre d’enseignement ; les matériaux botaniques abondent partout ; leur recherche, leur analyse sur place, à l’aide de l’œil nu ou armé d’une simple loupe, instruiraient plus les enfants que les leçons les mieux