confiées à la mémoire des apprentis, sans que leur intelligence soit mise à contribution pour les aider dans cette étude. Le manuel du timonier comporte des descriptions ou même des rectifications d’appareils tels que le sextant, le micromètre ou le cercle à calcul qui ne sont jamais utilisés par le breveté. Il en est de même de la tactique navale, des réparations des télégraphes, du magnétisme ou de l’électricité sur lesquels le manuel donne des aperçus qui deviennent inutiles puisqu’on récuse — à tort d’ailleurs — les timoniers quand il s’agit de manipuler à bord les appareils électriques ou magnétiques les plus simples. La marine se défie tellement de l’intelligence de tous ses apprentis qu’elle leur enseigne les notions du système métrique avec une parcimonie regrettable si on la compare avec l’instruction élémentaire donnée aux mécaniciens. Aucun programme des écoles ne comporte les idées de force, de travail ou de puissance, et cependant il semble que ces notions soient absolument nécessaires sur les bateaux modernes.
On voit par l’énumération précédente que les manuels ont un côté théorique mal enseigné parce qu’il repose sur la mémoire, et mal utilisé parce que les brevetés n’en font pas les applications pratiques. Cette dernière anomalie tient à l’envahissement des organes mécaniques du bord et à leur affectation exclusive aux mécaniciens. L’interdiction faite aux marins proprement dits de s’occuper des appareils mécaniques est tellement généralisée par les règlements qu’elle constitue un véritable anachronisme et une utilisation déplorable de ce personnel puisque ses aptitudes sont en partie inutilisées. On comprend bien que l’origine de cette erreur remonte, comme pour les officiers, à l’apparition de la machine à vapeur et à la création de la spécialité de mécaniciens. Peu à peu, les travaux mécaniques qui étaient primitivement localisés à la machine à vapeur se répandirent dans tous les services du bord en même temps que les organes mécaniques nouveaux se substituèrent aux anciens, mais, au lieu de modifier l’instruction des marins dans un sens industriel pour leur permettre de faire face aux exigences nouvelles de leur spécialité, on restreignit leur champ d’opération pour étendre celui des mécaniciens, considérés dès lors comme seuls