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LES TABLETTES D’ÉLOI

Suite du voyage à Nice.

Saint-Raphaël. — Comme j’ai télégraphié l’heure de mon arrivée dans la nuit, on pense que, prince ou duc, je voyage sous un faux nom et l’hôtel rallume tous ses feux. Les deux meilleurs chevaux se lèvent pour venir à la gare. Le nombreux personnel, au complet, m’attend. L’un de ces messieurs m’ouvre la portière. Un autre écarte les bras afin de recevoir mes bagages, et le cocher lui jette ma valise.

Je demande au plus gros s’il peut me donner une chambre. Il me répond que mes appartements sont prêts, et, bougie haute, il me fait signe de le suivre au numéro 198.

— Monsieur désire-t-il prendre quelque chose ?

— Une bouillotte d’eau chaude…

Quand je mets mes bottines à la porte, les lumières sont éteintes. Loin de se disputer l’honneur de me servir, les garçons se couchent.

Me voilà seul, sous les toits, dans une chambre nue, entre deux chambres qui sonnent le vide.


On aperçoit deux rochers rouges, l’un appelé le lion de mer, parce que, dit Alphonse Karr, il présente la forme d’un lion couché ; l’autre, appelé le lion de terre, a la forme d’un poisson.


Cannes (La Croisette). Éloi laisse négligemment tomber une de ses enveloppes sous la table, afin que les garçons puissent dire plus tard aux étrangers :

— Éloi a mangé ici.


O Méditerranée insensible à la lune, tu ne bouges jamais et tu suces éternellement d’une lèvre bleu pâle ton sable fade mêlé aux épluchures des hommes.


Et toi, jambe d’éléphant culottée de coquilles Saint-Jacques, porte-rasoirs, manche à gigot, tuyau de cheminée modèle, plumeau, palmier, salut !

La verdure de ces jardins réjouit mon œil comme l’étalage d’une coutellerie. Sur toutes ces pointes, appliquons-nous à lancer des anneaux.