Page:La Revue blanche, t30, 1903.djvu/83

Cette page n’a pas encore été corrigée

◘center

La Virulence du Sexe

Une cuisinière qui achète des harengs est bien embarrassée pour choisir, sans leur ouvrir le ventre, ceux qui sont, comme disent les marchands parisiens, laités ou ovés ; c’est que, chez ces poissons, les différences sexuelles extérieures sont très minimes ; il est vraisemblable que les différences physiologiques et psychologiques qui séparent les mâles des femelles n’ont également que peu d’importance ; le mâle laisse sortir sa laitance, la femelle ses ovules et, même dans cette fonction si sexuelle, les deux sexes se comportent d’une manière analogue ; il n’y a que le produit rejeté qui diffère. Nous devons donc penser que si les harengs constituaient une société comme la société humaine, il n’y aurait aucune distinction établie entre les mâles et les femelles dans la législation ; le sexe serait considéré comme une chose secondaire, n’ayant pas plus d’influence sur les capacités des individus que n’en ont, parmi nous, le timbre de la voix et la couleur des cheveux.

Beaucoup d’animaux se comportent, à ce point de vue, comme des harengs ; il n’y a aucune différence entre les oursins mâles et les oursins femelles, sauf quant à la nature du produit sexuel rejeté. Chez les pigeons, la différence, sans être encore bien considérable puisque nous ne savons pas non plus distinguer, sans dissection, le sexe d’un de ces animaux, s’accroît cependant du fait qu’il y a accouplement et que le rôle des deux sexes dans l’accouplement n’est pas le même.

Il est facile d’établir une gradation ininterrompue dans le règne animal, entre les animaux chez lesquels les différences sexuelles extérieures sont nulles comme chez les oursins et ceux où elles sont extrêmement accusées comme cela a lieu, par exemple, chez