fixe, alors que nous savons pertinemment qu’elle change à chaque instant. Et nous nous étonnons que le même individu, dans des conditions identiques, agisse deux fois de suite de deux manières différentes ; nous nous en étonnons parce que nous ne voulons pas nous souvenir que dans l’intervalle L’individu a changé, que ce n’est plus le même mécanisme ; nous le savons et cependant nous disons le contraire ; nous faisons un mensonge volontaire en affirmant que le même individu a réagi deux fois de suite différemment à des excitations identiques et que par conséquent il n’est pas soumis aux lois naturelles et peut créer du mouvement, faire des commencements absolus ! et cela serait, en effet, si le même mécanisme pouvait répondre différemment à des excitations identiques ; mais ce n’est plus le même mécanisme !
Ce n’est plus le même mécanisme, mais sa forme extérieure a si peu varié que nous la reconnaissons et que nous lui continuons la même appellation à travers toutes les modifications insensibles, mais certaines, qui de l’enfant font peu à peu un vieillard ! Cette conservation de la forme, ou plutôt cette variation continue et insensible de la forme est l’origine d’une erreur très répandue en biologie et qui n’est qu’un Cas particulier de l’erreur individualiste ; c’est l’erreur morphologique.
Que dans une cellule, par exemple, apparaisse une masse spéciale à contours limités et susceptible d’être vue au microscope, nous lui donnerons tout de suite un nom et par conséquent une individualité ; nous en parlerons comme d’une chose fixe, ayant des propriétés constantes, alors que nous savons très bien que tout change sans cesse dans une cellule vivante et que la forme de cette masse particulière au sein des liquides ambiants nous renseigne seulement sur le mouvement tourbillonnaire, sur le dynamisme spécial de ces liquides ambiants. Nous le savons, mais nous donnons cependant à cette masse un nom, un état civil, des propriétés intangibles ! Bien mieux, le dynamisme intracellulaire changeant à un certain moment, cette masse disparaît, mais, quelque temps après, le même dynamisme se reproduisant, une masse de même forme redevient visible ; nous disons que la première a réapparu ; nous lui continuons son nom et ses propriétés ; nous supposons implicitement, sans avoir d’ailleurs aucune raison pour cela, que les mêmes particules qui composaient la première masse se sont retrouvées pour reformer la seconde, alors qu’il y a bien des chances pour que les particules de tout à l’heure n’existent plus, aient été remaniées et transformées par les réactions intra-cellulaires. C’est Weismann