talité des gens qui les onl mises en évidence ; elles sont impersonnelles ; elles sont, en un mot. Mais comme elles gênent ceux qui aiment et respectent la tradition, ceux-ci souhaitent de tout leur cœur que les biologistes se soient trompés, et le souhaitant, ils le croient ; le croyant, ils le disent. Et pour expliquer que tant de savants se trompent en étudiant la nature, ils en sont pas fâchés de laisser penser que ces savants se sont peut-être volontairement trompés ; qu’ils ont cherché à nuire au dogme et ont interprété les faits d’une manière tendancieuse ; ainsi un biologiste qui ne se sera jamais soucié de l’enseignement du clergé et qui aura observé et raisonné sans parti pris, sera naturellement traité d’anticlérical. En réalité ce sont les dogmatistes qui, dans l’espèce, sont antiscientistes.
» Mais vous voyez combien serait utile à ceux que vous combattez, l’expression, par un biologiste, d’un sentiment analogue à celui que vous m’avez exprimé aujourd’hui. Faites de la biologie, vous serez suspect, et à bon droit, je l’avoue.
— Cela n’empêchera pas cependant, dit le docteur, qu’une vérité trouvée par moi soit aussi bonne que si elle était trouvée par vous.
— Évidemment, répondit M. Tacaud. Les vérités sont impersonnelles, et, avec le temps, elles triompheront de l’erreur ; ceux qui vivent de la tradition ne sauraient donc se proposer d’étouffer à tout jamais les conquêtes biologiques ; ils gagnent du temps et c’est déjà beaucoup. Et ils gagneront plus facilement du temps s’ils peuvent accuser les savants d’avoir falsifié leurs résultats sous l’empire d’idées préconçues. Encore m’exprimé-je mal car j’ai l’air de supposer que tous les croyants se refusent volontairement à constater l’évidence ; ils sont simplement dans un état d’esprit identique à celui que vous, avez avoué si crânement tout à l’heure ; ils aiment le dogme et ils sont naturellement hostiles à tout ce qui lui nuit, de même que vous, qui détestez les curés, appréciez, sans l’avoir étudiée, la doctrine matérialiste. Rappelez-vous les discussions auxquelles ont donné lieu les travaux de Pasteur sur la génération spontanée. Les dogmatistes ont su infiniment de gré à notre grand chimiste d’avoir découvert quelque chose qui leur paraissait, bien à tort d’ailleurs, devoir définitivement démontrer la nécessité de la création divine ; et le concert d’éloges qui en est résulté aurait pu faire croire que Pasteur avait lui-même empêché qu’il y eût génération spontanée. Cependant, il n’en pouvait mais ! Si les phénomènes naturels l’avaient conduit à un résultat contraire, on l’aurait déclaré, lui aussi, anticlérical. Et d’ailleurs, ses adversaires dans cette affaire, et c’étaient des