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La Bataille de Morsang

… Donc, les mariniers de Seine, témoins de l’authenticité de notre récit, mais de qui, avare de place, nous ne rapporterons ici que quelques noms choisis, notre pudeur, surtout, s’opposant à l’impression des autres ; et d’ailleurs ces gens n’ont point de noms, mais des sobriquets signalétiques et sémaphoriques dont ils se saluent au cours de leurs dérives ; donc les mariniers :

Camberleau,
Bailleu,
Pomme-Cuite,
Beurre-de-Bique,
Jaune-d’Œuf,
Lapesée,
Lachique,
Petitpoil,
Fracasse,
Pain-d’Épice,
Le Bandeux,
L’Œil,
Le Jappeu,
Labeuche,
Poupineau,
Pingrelot,
Cul-de-Rat,
Pied-Jaune,

La Couleuvre,
La Colle-Bombe,
Nez-de-Chat,
Aime-en-Voyage,
La Raideur,
Tournigrouille,

La Barbe, dit aussi Grandes-Moustaches,
La Mouche,

La Chouette,
Visenbas,
Belcœur,

L’Amour, le même que Namour,
L’Ablette,

Mal-au-Ventre,
Pierre-à-l’Huile,
Le Mangeur de Crocros,

et mille autres, soussignés, trouvèrent, après qu’ils eurent surmonté leur première panique des crocodiles de Bacchus, avant celle des cadavres d’hommes et de l’ophélie ventre en l’air, dansant le cake-walk — ils trouvèrent la bouteille de verre blanc, de la capacité d’un litre exact, acculée au pont de bateaux où ne passerait plus d’armée. Au rouleau de parchemin qui y était inclus, intitulé « manuscrit trouvé dans une bataille » (sic), s’inscrivaient les Chapitres Précédents de l’Aventure, lesquels constituent un gros livre : compendieusement, comme quoi Erbrand Sacqueville, méprisé et quant à la constitution physique et quant au courage par sa fiancée Jeanne Sabrenas parce qu’il ne voulait point se faire soldat ; alléguant vainement qu’il eût accepté de