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heureux, nul reproche ne nous incombera de leur décès. De peur qu’ils ne se dérobent à leur devoir de courageux citoyens, ou fassent la petite bouche de modestie, alléguant « qu’ils ne sont pas dignes de l’honneur… que leurs capacités ne leur confèrent aucun droit à cette, il est vrai, flatteuse distinction, etc., etc. » et cherchent à s’échapper par des faux-fuyants aussi piètres, nous les avertirons que chaque démission sera immédiatement punie de mort, et qualifiée crime de lèse-patrie. Un cordon de soldats cernera le Palais ; ordre de tirer sur les récalcitrants. Ceci arrêté, il ne nous restera plus qu’à régler l’ordre des promotions, et à les diriger par groupes sur le sanctuaire désaffecté de la Mécanique. Le système ici détaillé n’est pas pour froisser notre hypocrisie formaliste. Le Dahomey est trop loin, et d’ailleurs réservé aux seuls militaires. Il convenait de trouver plus simple à la fois, plus économique et plus complet. Voilà. — Qu’on se le dise !



Tout de suite, un mieux sensible se manifestera dans l’état de l’actuelle société ; les ulcères qui la rongent, cicatriseront. Nous jouirons de l’Âge d’or prédit, au petit bonheur, par les voyants. Je vous invite, d’avance, au banquet d’inauguration de notre Néo-Salente.

D’abord nous obtiendrions une au moins provisoire solution à la Question sociale. Vous avez remarqué, en effet, que les pauvres ont, en temps de choléra, un penchant étrange à mourir en masse. (Les philantropes observent, à ce propos, qu’ils créent des foyers infectieux dont les riches peuvent avoir à souffrir.)

Or, la plus radicale extinction du Paupérisme consistant à se débarrasser des pauvres, on engagerait les indigents, mendigots, traîne-misère, loqueteux malpropres fauteurs de disparates, à visiter le Palais des Solutions Absolues. Pour les y conduire, on mettrait à leur tête les brouillons alarmants qui complotent contre la sécurité des Heureux. On ne les reverrait plus, soyez-en assuré ! On profiterait de l’occasion pour désormais assainir et aménager les quartiers