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De l’adaptation des Épidémies
Au bonheur public


À Monsieur Émile Gautier, vulgarisateur.



Monsieur,

Des gens que je me plais à reconnaître sagaces se sont affligés pour ce que nous laissions tant de forces en déshérence. Le long de ce pauvre monde, déjà si mal aménagé à la commodité de l’homme, mille choses se perdent faute d’un initiateur qui les approprie à notre usage. C’est ainsi que (Edison, vous êtes bien coupable !) le vent, le flux et le reflux de la mer, les éruptions volcaniques, les phénomènes naturels ne servent à rien, sinon à fournir des métaphores aux poètes, rêveurs, sentimentaux, et autre racaille. N’êtes-vous pas triste, lorsque vous songez à toutes les scieries mécaniques qui sont en puissance dans les chutes du Niagara, depuis des siècles, et qui n’arrivent pas à éclore ? Ô la mélancolie de la matière incomprise ! Moi, de telles réflexions me désolent, et j’avais jadis résolu de fonder l’Œuvre des Virtualités de la Nature, de haute bienfaisance s’il en fût.

L’orage aurait, enfin, une raison d’être, si l’on construisait des accumulateurs capables de retenir, à titre d’indemnité, l’électricité qu’il développe. Notre bitume n’était utilisé que par les colporteuses de spasmes, aux futiles évolutions, quand un ingénieur, plutôt un Dieu ! projeta d’employer les trottoirs comme puissance motrice. Il vous en souvient, le Figaro donna les détails de cette glorieuse invention. Par malheur, les capitaux se firent excuser.