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LES
PROGRÈS DE L’APOLITIQUE EN FRANCE

À M. Maurice Barrés,      
député de la 2e circonscription de Nancy


On se refuserait assurément à considérer cette étude comme sérieuse si je n’en énumérais au début un certain nombre de raisons certaines et péremptoires. Je dirai donc qu’elle est de l’intérêt le plus puissant et le plus actuel, puisqu’elle m’a semblé intéressante quand j’ai commencé de l’écrire, et pas trop ennuyeuse quand j’ai eu fini. Je dirai aussi que les problèmes les plus passionnants sont ceux que l’on se pose à soi-même, et que rien n’est si divertissant que de mettre sous un mot nouveau, fût-ce une idée vieille.

Peut-être se souvient-on que la Chambre nous réserva, voici maintenant presque six mois, la surprise d’une crise ministérielle. Cette crise n’était ni moins inattendue ni plus banale qu’une autre. Elle laissa le public plutôt indifférent. Le jour même où M. Bourgeois mandé à l’Élysée déclinait la mission de former un cabinet, je passais rue Montmartre avec mon ami Charles Martin, dont un livre récent a rendu populaires la raison froide et le sens pratique. Au coin de la rue du Croissant, nous heurtâmes un vieux camelot qui vociférait. Charles lui dit :

— Ça fait votre affaire, ces crises ministérielles ?

— Peuh ! répliqua-t-il, sale métier ! Le soir du 27 janvier, nous avons eu des bouillons.

La matière eût été bonne à de spirituels développements sur le krach du journal. Nous avons bien le