proportionnée à la durée de cet emploi, tandis que le défaut constant d’usage de tel organe, l’affaiblit insensiblement, le détériore, diminue progressivement ses facultés et finit par le faire disparaître. »
La deuxième loi est celle de l’hérédité des caractères acquis :
« Tout ce que la nature a fait acquérir ou perdre aux individus par l’influence des circonstances où leur race se trouve depuis longtemps exposée et, par conséquent, par l’influence de l’emploi prédominant de tel organe ou par celle d’un défaut constant d’usage de telle partie ; elle le conserve par la génération aux nouveaux individus qui en proviennent, pourvu que les changements acquis soient communs aux deux sexes ou à ceux qui ont produit ces nouveaux individus. »
C’est au moyen de ces deux principes que Lamarck va réduire à néant les considérations finalistes (p. 235) :
« Les naturalistes ayant remarqué que les formes des parties des animaux, comparées aux usages de ces parties, sont toujours parfaitement en rapport, ont pensé que les formes et l’état des parties en avaient amené l’emploi : or c’est là l’erreur ; car il est facile de démontrer par l’observation, que ce sont, au contraire, les besoins et les usages des parties qui ont développé ces mêmes parties, qui les ont même fait naître lorsqu’elles n’existaient pas et qui, conséquemment, ont donné lieu à l’état où nous les observons dans chaque animal.
« Pour que cela ne fût pas ainsi, il eût fallu que la nature eût créé, pour les parties des animaux, autant de formes que la diversité des circonstances dans lesquelles ils ont à vivre l’eût exigé, et que ces formes ainsi que ces circonstances, ne variassent jamais.
« … Depuis longtemps, ajoute Lamarck, on a eu à cet égard, le sentiment de ce qui est, puisqu’on a établi la sentence suivante qui a passé en proverbe et que tout le monde connaît : les habitudes forment une seconde nature. »
C’est ce principe de Lamarck que l’on résume trop brièvement dans la formule : La fonction crée l’organe. Cette formule trop concise a généralement été mal entendue ; il est nécessaire que nous nous y arrêtions quelques instants. Il est bien évident que si un escargot a besoin de se gratter, ce besoin ne lui fait pas pousser une main, et que si l’homme a besoin de regarder derrière lui, cette nécessité ne développe pas chez lui l’œil de Victor Considérant. C’est que le mot organe est le plus souvent pris dans une acception qu’il n’a pas. On dit, par exemple, à tort, que la main est l’organe de la préhension ; cela est faux ; la main fait partie, chez l’homme, de ce qui constitue ordinairement l’organe de la préhension, mais si l’on coupe les deux mains à un homme, il exécute néanmoins avec ses moignons la fonction de préhension ; il peut l’exécuter également avec ses pieds, avec sa bouche, etc. L’organe de la préhension est défini par la fonction même de la préhension et comprend l’ensemble des tissus qui collaborent à