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Les ouvrières en fleurs artificielles. — Par l’inhalation de poussières toxiques provenant du saupoudrage ou détachées des fleurs, particulièrement dans l’opération du diamantage avec cristal pulvérisé (minium et oxydes de plomb dans les bagues) [1].

Les ouvrières de tréfilerie. — Par la production des buées et de matières toxiques dans la fonte de l’alliage plombifère et la confection des fils de laiton.

Les piqueuses de bottines. — Par l’affilage avec les lèvres de fils chargés de sels de plomb et le machonnage des bouts coupés (litharge, céruse, sulfure de plomb).

Les ouvrières de la miroiterie. — Dans le brossage et le ponçage ; le polissage au papier de verre (céruse, litharge).

Les empaqueteuses de tabac, de chocolat, de thé. — Dans la manipulation des feuilles d’étain plombifère (crasses toxiques sur les doigts et sur les ongles).

Signalons encore parmi les ouvrières exposées au saturnisme :

Les ouvrières employées à l’étamage, au plombage, à la chaudronnerie ; les tailleuses de limes ; les ouvrières de la verrerie et de la vitrerie ; les cartonnières, les broyeuses de couleurs, les collectionneuses de papiers à cigarettes, les vernisseuses de laqués, les typographes, les tisseuses et les dévideuses (minium, chromate de plomb), les lamineuses de plomb, les ouvrières des fabriques de céruse, de papiers moirés, d’épingles, de tôle émaillée, de crayons colorés, de papiers peints (sulfure, acétate de plomb).

Les ouvrières de filatures sont particulièrement atteintes par le chromate de plomb. Dans le coton teint en flotte venant des teintureries de Lyon, Roubaix et Rouen, on a trouvé 10 % de chromate de plomb ; dans la bourre qui se détache au cours de la manipulation 18 %, et dans la poussière lourde ramassée sur le sol de l’atelier, 44 % [2].

Le Dr  Proust signale aussi des accidents plombiques chez des tisseuses de coton par suite de l’addition de céruse aux apprêts pour augmenter le poids du tissu.

Le Dr  Robert Smith a constaté une véritable épidémie d’intoxication

  1. Plusieurs couturières, après s’être servi de soie, ont présenté des accidents d’intoxication saturnine ; l’une d’elles ayant remarqué que chaque fois qu’elle mouillait ses doigts ou qu’elle passait le fil de soie dans sa bouche pour resserrer les brins, elle éprouvait une saveur légèrement sucrée. Chevallier fit acheter de la soie dans un grand nombre de fabriques ; cinquante échantillons, tous trempés séparément dans une petite quantité d’eau abandonnèrent une grande partie de leur poids. La matière pesante fut reconnue pour de l’acétate de plomb, 20 % de ce poison étaient mêlés à la soie. On avait pris un brevet d’invention pour ce mélange. Enlenberg ayant fait l’analyse d’une soie rouge ainsi chargée, a trouvé 17 grammes 71 de plomb dans 100 grammes de soie.

    « Les accidents saturnins, résultant de l’usage de telles soies sont rendus plus fréquents encore chez les couturières, par l’habitude qu’elles ont d’amincir l’extrémité du fil en le passant dans leur bouche. En outre, elles cassent la plupart du temps ce fil avec leurs dents et gardent quelquefois la partie rompue dans leur bouche. »

    Dr  Proust, Traité d’Hygiène.
  2. Les poisons industriels, 1901 (Office du Travail).