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Mais ce n’était pas tout. Il nous apprit qu’après avoir extrait le minerai il faudrait le transporter dans des chariots jusqu’à une raffinerie lointaine, le faire moudre et en retirer l’argent par un procédé compliqué et coûteux. Notre fortune nous parut remise à un siècle.

Pourtant nous nous mîmes à l’ouvrage. Nous nous décidâmes pour le forage d’un puits. Donc, pendant une semaine, nous escaladâmes la montagne, chargés de pics, de forets, de coins, de pinces, de pelles, de bidons de poudre, de paquets de mèche, et nous suâmes sang et eau. D’abord le rocher était morcelé et délité, nous le creusions avec des pics et le déblayions avec des pelles, et le trou avançait à souhait. Mais voici que le roc devint plus compact et les coins et les pinces entrèrent en jeu. Bientôt rien ne put l’entamer que la poudre de mine. C’était là un travail des plus épuisants. L’un de nous tenait le foret de fer en place pendant qu’un autre frappait dessus avec un marteau de huit livres. Au bout d’une heure ou deux le foret s’était enfoncé de deux ou trois pieds, creusant un trou d’une couple de pouces de diamètre. Nous y placions une charge, nous y insérions un demi-mètre de mèche, nous y versions du sable et des cailloux, nous les tassions bien, puis nous allumions la mèche et nous nous sauvions. Quand l’explosion se produisait et que les rochers et la fumée sautaient en l’air, nous revenions et nous trouvions à peu près un boisseau de ce quartz opiniâtre et rebelle fracassé. Pas plus. Une semaine de ceci me suffit, je démissionnai. Clagett et Oliphant me suivirent. Notre puits n’avait que douze pieds. Nous décidâmes qu’un tunnel ferait notre affaire.

Nous descendîmes donc au bas de la montagne et nous travaillâmes une semaine ; au bout de ce temps, nous avions miné un tunnel à peu près assez creux pour y cacher un tonneau et nous calculâmes que quelque neuf cents pieds de plus nous mèneraient au filon. Je démissionnai de nouveau et les camarades ne tinrent bon qu’un jour de plus. Nous voulions un filon déjà développé. — Il n’y en avait pas dans le camp.

Nous abandonnâmes le « Monarque » provisoirement.

Pendant ce temps-là, le camp se remplissait de monde et l’émotion causée par nos mines du Humboldt croissait constamment. Nous tombâmes victimes de l’épidémie et dépensâmes toute notre énergie à acquérir de nouveaux « pieds ». Nous explorâmes et prîmes de nouvelles concessions, nous y plaçâmes des avis et leur donnâmes des noms grandiloquents. Nous troquâmes une partie de nos « pieds » contre des « pieds » d’autres