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la région tendant à ce que l’âge d’admission des femmes au travail de nuit fut abaissé à 18 ans.

Au surplus l’application des dispositions légales relatives au travail de nuit, ne peut guère inquiéter les industriels et les fabricants. Ils ont intérêt à payer des contraventions plutôt que de se passer du travail nocturne.

L’enquête autrichienne de 1896, sur le travail de nuit, rapporte que des brodeuses, des couseuses de chapeaux, des plumassières, etc., travaillent jusqu’à 2 et 3 heures du matin. Les femmes travaillant dans la fourrure, les passementières, les blanchisseuses, les ouvrières en parapluies et ombrelles, les gantières, les cravatières, les chemisières subissent le même sort. Toutes ont affirmé qu’en conséquence de la fatigue, le travail de nuit ne leur rapporte que les trois quarts ou les quatre cinquièmes du salaire qu’elles obtiennent le jour. Les fleuristes, les monteuses de guirlandes de fleurs et les cartonnières souffrent aussi d’un travail de nuit très étendu pendant la saison.

Tous ces]exemples, pris intentionnellement à l’étranger, prouvent que, dans leur ensemble, les conditions du travail ne sont pas moins meurtrières au delà des Alpes qu’en deçà. La forme du gouvernement ne change pas les conditions d’exploitation. L’empire d’Autriche et celui d’Allemagne, le royaume d’Angleterre et la république française sont identiques au point de vue de l’exploitation de la femme par l’homme et de l’homme par l’homme.

En France, la loi du 2 novembre 1892 interdit, en principe, le travail de nuit aux enfants et aux femmes, mais cette mesure est si difficilement applicable que l’article 4 de la même loi fait une restriction qui équivaut à l’autorisation : elle a exceptionnellement autorisé le travail de nuit entre 4 heures du matin et 10 heures du soir, quand il est réparti entre deux postes d’ouvriers ne travaillant pas chacun plus de neuf heures coupées par une heure de repos [1].

L’article 4, § 4, permet d’occuper les femmes et les filles âgées de plus de 18 ans jusqu’à 11 heures du soir, pendant soixante jours par an, à condition que la durée de la journée ne dépasse pas douze heures.

Certains établissements sont autorisés à déroger d’une façon permanente à l’interdiction du travail de nuit.

Les femmes et les enfants sont occupés dans les usines à feu continu et par conséquent y travaillent la nuit.

Les industries où les contraventions ont été le plus nombreuses sont, par ordre de fréquence : modes, confections, couture, lingerie, fabriques de fécules, tissages de coton, moulinages de soie, confiseries, fabriques de chocolat, imprimeries, verreries et cristalleries, blanchisseries.

Le droit d’octroyer diverses tolérances et de lever certaines interdictions concernant le travail de nuit, la durée du travail et le repos hebdomadaire, a été concédé à l’inspecteur divisionnaire du travail. Les indus-

  1. D’après la loi du 30 mars 1900, l’organisation du travail par relais est interdite sauf pour les usines à feu continu et les établissements qui seront déterminés par un règlement d’administration publique.