À voix basse, Charlotte dit :
— Gœthe...
Kœnigsberg se tenait près d’elle. Il effleura sa fine main blanche, cette image mobile et rayonnante de l’âme, de l’esprit... À cet instant, il sentit véritablement :
— The representative beauty of the world... ! Charlotte tressaillit. Elle pensait :
— Que sommes-nous, nous qui devrions, pour l’homme, représenter la « beauté des mondes », comme le piano représente l’orchestre philharmonique, le monde « musique » ?!
Elle dit :
— Qu’êtes-vous donc au juste, monsieur K. ? Personne ne peut arriver à vous comprendre,..
K. :
— Je suis un qui cherche, un qui ne trouve pas, un qui trouble le calme, un qui apporte le mouvement.
Charlotte :
— Nous sommes trop fatigués pour vous, monsieur Albert K., trop pauvres. Nous pâlissons en votre société, nous devenons inquiets, nous nous recueillons ; à quoi bon ?! Vous êtes comme la nature « rêvant d’idéal ». Vous êtes quelque chose d’inflexible.
Le savant :
— Parfaitement, c’est une femme riche qu’il lui faut, une reine ! Je connais une dame qui est une reine. Elle a une âme royale, son âme possède le monde tandis qu’elle en éprouve la sensation.
— Qui est-ce ?
— Je ne dirai pas son nom. Elle est mariée, contente. Et pourtant, c’est pour toi qu’elle est venue au monde !
Le vent nocturne soufflait, apportant une odeur de sapins.
— Rentrons, dit Charlotte ; il fait froid et sombre...