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Slade naquit dans l’Illinois d’une bonne famille. À l’âge de 26 ans il tua un homme dans une querelle et s’enfuit du pays. À Saint-Joseph, Missouri, il entra dans l’un des premiers convois d’émigrants pour la Californie et fut chargé du poste de chef de convoi. Un jour dans les Plaines il eut une violente dispute avec l’un de ses charretiers et tous deux tirèrent leurs revolvers, mais le charretier fut l’artiste le plus leste et le premier en garde. Aussi Slade lui représenta que c’était pitié de gaspiller du sang pour si peu de chose et lui proposa de jeter les pistolets à terre et de vider la querelle à coups de poings. Le charretier confiant y consentit et jeta son pistolet, sur quoi Slade rit de sa naïveté et le tua net.

Il s’échappa pendant quelque temps menant une vie sauvage, passant la moitié de son temps à faire la guerre aux Indiens et l’autre moitié à esquiver un sheriff de l’Illinois envoyé pour l’arrêter après son premier meurtre. On dit que dans un seul combat contre les Indiens il tua trois sauvages de sa propre main, leur coupa ensuite les oreilles et les envoya avec ses compliments au chef de la tribu.

Slade conquit bientôt une renommée de résolution intrépide et ce lui fut un mérite suffisant pour lui procurer la place importante d’agent de division de la Grande Ligne à Julesbourg au lieu de M. Jules, révoqué. Depuis quelque temps déjà, les chevaux de la Compagnie étaient fréquemment volés et ses voitures retardées par des bandes de malfaiteurs qui riaient à l’idée que quelqu’un eût la témérité de ressentir ces outrages. Slade les ressentit promptement. Les brigands éprouvèrent bientôt que le nouvel agent était un homme qui n’avait peur de rien au monde. Il fit courte besogne de tous les coupables. Il en résulta que les retards cessèrent, que la propriété de la Compagnie fut respectée et que, quoi qu’il arrivât ou aux dépens de qui que ce fût, les voitures de Slade firent leur trajet, à tout coup ! Il est vrai que pour amener ce changement salutaire Slade dut tuer plusieurs hommes, les uns disent trois, d’autres quatre et d’autres six, mais le monde gagna à leur perte. La première difficulté grave qu’il eut fut avec l’ex-agent Jules qui avait la réputation d’être lui-même un spadassin sans scrupules. Jules détestait Slade qui l’avait supplanté, et tout ce qu’il attendait, c’était une belle et bonne occasion de se battre avec lui. Bientôt Slade osa employer un homme que Jules avait autrefois congédié. Ensuite, Slade se saisit d’un attelage de chevaux de poste qu’il accusa Jules d’avoir détourné et caché quelque part pour son usage person-