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les “ cocos ”
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Trois disciplinaires, Mir, Dufort et Peeters, devant les menaces de mort que leur avait faites le sergent Rolland, s’enfuirent de la corvée de charbon craignant d’être buttés[1]. Repris par la gendarmerie, ils furent internés dans les locaux disciplinaires de l’artillerie à Antsirène. Là, sur l’ordre d’un maréchal des logis chef, l’artilleur Camus les attacha à la crapaudine. Être à la crapaudine, c’est avoir les chevilles et les poignets liés derrière le dos en un faisceau unique. Pour atroce qu’elle soit quand elle se prolonge, cette position était encore trop douce, car le margichef fit suspendre à une poutre les trois hommes, ainsi retroussés. Puis il partit emportant la clef du local. Eux, restèrent ainsi quatre heures. Après quoi, Mir, qui avait été mal ficelé par l’artilleur, parvint à se dégager et put délivrer du supplice ses camarades. Ils passèrent deux jours sans boire ni manger. Le troisième jour, le fourrier Poirrot, étant venu les visiter et les trouvant détachés, leur mit un « plat de poucettes »[2].


CAUSES ET EFFETS

Sur le régime subi aux Cocos, voici quelques faits :

Le disciplinaire Lefèvre, revenant de la cuisine où il était allé chercher la soupe, en renversa sur le chien de l’adjudant qui s’était jeté dans ses jambes. Il fut mis immédiatement en cellule ; motif : « A renversé un plat de bouillon chaud sur le chien de l’adjudant et l’a traité de sale cabot ». Après avoir été roué de coups, Lefèvre fut attaché par les pieds à une poutre placée à environ un mètre au-dessus du sol ; dans cette position on le laissa deux jours, sa tête et ses épaules portant seules à terre. D’une complexion délicate, Lefèvre fut pris d’une fièvre intense : il dut entrer à l’hôpital, où il resta vingt-cinq jours. Craignant quelque vengeance de la part des gradés, il en sortit sans avoir osé révéler au major le traitement dont il avait été victime et dont tout son corps portait les marques.

Le disciplinaire Pilardo, atteint des fièvres, se fait porter malade. Le caporal qui le conduisait à la visite, afin qu’il ne fût pas reconnu tel, mit sur le cahier de visite une observation le signalant comme mauvais sujet ; néanmoins, le major accorde à Pilardo le « p. s. p. » (peut se présenter). Malgré cette mention, les gradés, ne le considérant pas comme malade, le mirent sur la piste. Pilardo, sans forces, s’arrêta de tourner.

Le caporal Bernard, s’avançant vers lui : « Donne tes pouces ! » Docile, Pilardo tendit ses mains aux poucettes. Lorsque les pouces furent bien engagés dans les mâchoires d’acier, Bernard serra avec rage. Le disciplinaire tomba à genoux en hurlant de douleur. Alors Bernard : « Un soupir de plus, un tour de plus ». Pilardo s’évanouit ; le sang lui suintait

  1. Être tués à coups de revolver.
  2. Voir les renseignements déjà donnés sur cette torture.