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d’idoles inférieures en grade à l’idole-chef. Devant celle-ci, on brûle des bâtons d’encens, des cierges et du bois précieux.

On leur présente aussi des aliments. Les adorateurs s’imaginent que l’essence en est absorbée par le dieu ; quant aux substances, elles demeurent pour leur propre régal. De fait, les dévots consomment eux-mêmes les offrandes présentées à l’idole, conciliant ainsi l’économie et la générosité.

L’idolâtrie en Chine n’est pas fondée sur la croyance que le bois, les pierres ou tous autres objets inanimés soient en eux-mêmes dignes d’adoration ; mais, selon la foi de la foule, des esprits y viennent établir leur séjour.

Ce que les Chinois des trois religions indigènes ont de commun, c’est l’extrême insouciance d’élever religieusement la jeunesse. Les trois grandes religions de la Chine n’ont rien qui ressemble à l’école chrétienne du dimanche. Garçons et filles prennent quelques idées religieuses dans le commerce des personnes avec qui ils vivent. Mais jamais d’une manière délibérée on ne leur parle de tel dieu ou de tel autre, de leurs attributs, de leur pouvoir. La connaissance leur en vient incidemment. Il y a, certes, beaucoup de livres religieux ; mais, à cause de la difficulté que l’on trouve à apprendre à lire, ils restent inaccessibles aux enfants.

Je me rappelle comment, la première fois que l’on me conduisit dans un temple et que l’on m’invita à m’agenouiller devant une idole vêtue d’habits somptueux, sa face m’apparut noircie par la fumée de l’encens. À chacun des quatre coins du temple, s’élevait une idole immense, d’aspect sévère et formidable. L’une d’elles m’effraya particulièrement.

C’était le dieu du tonnerre, représenté par un monstre ayant un corps d’homme et une tête d’oiseau hideusement grotesque. Cette idole tenait dans une main un marteau et dans l’autre un grand clou. Avec ces outils, il était censé frapper les coupables. Ce dieu produisit sur moi une telle impression, que j’eus un horrible songe la nuit suivante. Je le vis revêtu de violence ; il agitait les mains pour me terrifier.

Si frappé de stupeur que je fusse, je m’efforçai de crier, et mes cris me réveillèrent.

Quand on observe l’esprit conservateur des Chinois, leurs traditions, la pure morale que leur enseigna Koung-Fou-Tseu, leur méthode d’instruction, les préventions légitimes qu’ils entretiennent contre les étrangers, l’on comprend que l’œuvre des missionnaires ne progresse que faiblement. Néanmoins, quelque chose a été fait pendant ces cinquante dernières années. L’on a exploré le pays, et l’on a appris à connaître ses besoins et ses facultés.


VIII
Jours Fériés

Il y aurait matière à vingt chapitres, si l’on voulait décrire toutes les fêtes chinoises. La seule énumération en serait pénible et fastidieuse.