après une lutte qui, j’ose le dire, ne fut pas sans gloire : ceci se passait en 1887.
Vers 1890, l’éducation de ma fille m’obligeait à venir m’installer à La Marche, et j’avais la bonne fortune de laisser les Petits-Cailloux entre les mains d’un gérant qui me donne toutes les garanties désirables, tant au point de vue des aptitudes que de l’honnêteté. À partir de cette époque j’ai donc pu me consacrer plus complètement à la défense et à l’affirmation de mes convictions.
La situation politique, dans notre arrondissement de La Marche, était la suivante : une population foncièrement républicaine, et même républicaine avancée, mais qui, par apathie, manque d’hommes, faute d’être conduite, votait depuis vingt ans pour un vieux suppôt de l’Empire, le baron Lambusquet.
Ma tactique a été bien simple, — réveiller les énergies, prêcher l’union, et surtout répéter ce que je répète encore : — Les personnalités comme la mienne ne sont rien, elles s’effacent devant les principes ; votez pour moi ou pour un autre, mais n’abandonnez pas les principes ! — Et c’est ainsi que j’ai pu chasser Lambusquet du Conseil général en 1893, et qu’aux dernières élections législatives, ses agents durent, pour lui obtenir encore une fois les apparences d’un succès, apitoyer les électeurs sur son grand âge et les persuader qu’il allait bientôt mourir.
Le baron Lambusquet est mort, en effet, comme vous savez, au mois de juin dernier : — malgré la campagne acharnée dont j’ai été l’objet de la part du maire réactionnaire de La Marche, Alcide Caille, mon concurrent, soutenu officiellement par l’Évêché et même, en secret, par certaines personnalités républicaines, — malgré l’intervention, à la dernière heure, d’un pseudo-candidat blanquiste, un certain Tripette, visiblement payé par mes adversaires pour tenter une diversion, m’enlever quelques voix et parvenir ainsi au ballottage, — le collège électoral réuni à la fin d’août m’a proclamé au premier tour, par 3 620 voix contre 3 273 à M. Caille, et 62 à M. Tripette.
Et maintenant je n’ai plus qu’une pensée, me mettre à la besogne et faire bonne besogne. Je ne me pose ni en légiste, ni en tribun ; mais j’ai quelque expérience ; j’ai l’honneur de représenter une région qui est la mienne et que je connais bien, dont les besoins me sont familiers, dont j’ai pu étudier à fond les justes desiderata. Nouveau venu dans l’enceinte parlementaire, j’aurai cette unique ambition de remplir le programme sur lequel les électeurs du Plateau-Central se sont prononcés et m’ont élu : — Relèvement de l’agriculture et protection du petit commerce par la diminution du fonctionnarisme et grâce à une répartition plus équitable de l’impôt. — Il me semble en effet, et j’ai toujours tenu, qu’il y aurait dans l’application de cette brève et simple formule plus de vérité et de bien-être efficace que dans les utopies dont se leurrent et nous leurrent trop de théoriciens en chambre de la Chambre. Mais il ne m’appartient pas d’en dire plus long