blique et ne pas bien savoir doctoralement ce que l’on fait que d’être un docteur, et de donner la vie des autres.
Quand on sera sincère on sera clairvoyant. M. Lagardelle écrit : « Des socialistes conscients, voulant que notre parti prît sa part de responsabilité dans la défense de la République, ont cru aussi que le concours d’un socialiste était nécessaire pour dénouer la crise. À une situation exceptionnelle ils ont voulu faire correspondre une action exceptionnelle. Mais ils ont exagéré le péril… » Enfin qu’est-ce qu’il en sait ? Les mieux renseignés ne pouvaient savoir qu’une partie des préparatifs, des préparations : or nous avons éprouvé récemment que les événements ne répondent pas toujours aux préparations, qu’il y a des hasards efficaces à conséquences lointaines : si M. Félix Faure n’était pas mort opportunément en état de péché mortel, nous serions fusillés peut-être, et M. Lagardelle serait sans doute exilé en Allemagne.
Quand on sera sincère on sera intelligent. M. Lagardelle écrit : « Les sanctions prises n’ont été que très normales, et n’exigeaient nullement pour être portées, l’entrée d’un socialiste dans un ministère Waldeck-Rousseau-Galliffet. » Or ce sont justement les sanctions normales, en temps de crise, qui sont difficiles à porter, parce que des sanctions normales ne donnent leur effet que si elles sont portées par un gouvernement évidemment fort.
Il est facile de dire après l’événement : « Ils ont exagéré le péril. » On peut toujours ainsi prophétiser le passé. Il est facile aussi de déclarer, comme d’autres l’ont fait, que si le ministère avait été mis en minorité on aurait bien vu, qu’il serait resté le peuple. Nous prions qu’on laisse de côté ces phrases électorales. Le peuple de France n’avait pas, dans l’espèce, le nombre et la force révolutionnaire qu’avait en même temps, pour une cause voisine, le peuple belge ; le peuple de France n’avait la sympathie et l’adhésion partielle d’aucune garde civique. Il ne restait donc que Faction individuelle, l’acte individuel, comme savent le faire les anarchistes ; mais les hommes libres qui eussent donné leur vie, corps pour corps, pour la défense de la justice, n’étaient nullement disposés à la donner pour justifier une attitude parlementaire, ni même pour illustrer une argumentation scholastique.
Quand on sera sincère on sera juste. On ne se fera pas accroire que tous ces bourgeois dreyfusards sont devenus socialistes par intérêt personnel ou par intérêt de classe. Il m’a été donné de connaître un assez grand nombre de dreyfusards, en un temps où M. Déroulède ne l’était pas encore devenu. Je puis certifier que ces honnêtes gens n’avaient pas une pensée, je dis la plus lointaine ou la plus involontaire, pour leurs intérêts. C’étaient pour la plupart des universitaires, gens de peu de bien, comme on sait, des étudiants, des élèves ; quelques-uns étaient élèves d’une école où certainement, tout intellectuels que l’on soit, la proportion des parents vraiment très pauvres est