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nes d’expressions échangées, latines, françaises, allemandes, anglaises. Quelle merveilleuse œuvre devant l’histoire, Monsieur de Rothschild, s’il vous appartenait d’établir, grâce à la puissance de l’or, ce royaume nouveau. La Chine Méridionale serait le meilleur champ d’expériences.

Nos socialistes y éduqueraient le travail indigène, l’adapteraient au service des machines, le formeraient en excellent disciple de l’électricité, de la vapenur, du dynamisme explosif, de l’aérostation. Loin des Barbares d’Occident, une féerie de bonté et de puissance illuminerait le siècle qui va s’ouvrir. C’est l’espoir que je forme avant d’entreprendre cette campagne de la guerre sociale. Au cas où, ne pouvant réussir à la destruction des forces capitalistes, nous nous serions toutefois imposés comme une puissance redoutable, mon intention est d’obtenir la concession pleine et entière d’un pays fertile et sain, avec toutes les facilités de l’exode pour mes troupes et leurs familles. Sur la côte des mers chinoises, il est possible de multiplier les grands ports, de parvenir à dominer les mers par la première flotte du monde.

Le mauvais état des finances en Italie, dans les républiques Sud Américaines, en Espagne, lorsque les Américains auront fini d’occuper Cuba, permettrait d’acquérir bientôt le total ou la grande partie des escadres appartenant à ces nations. Mais, si les savants du monde trouvent dans cette patrie fraîche un meilleur accueil que dans les autres, nous avons lieu de penser que leurs efforts mèneront vite à l’excellence l’aérostation militaire et créeront une défense infrangible. En ne cachant rien de notre goût pour les arts, les lettres, les sciences ; en installant avec magnificence et de grandes aises matérielles ceux de leurs protagonistes qui viendraient à nous, on déplacerait en fort peu de temps le centre intellectuel du monde. Paris s’en irait dans le Kouang-Si, ou bien à Yunnan-See. Nous laisserions à leur barbarie les barbares.

Je ne compte pas, Monsieur, tout obtenir de vous. Vous n’êtes point ami de remuer ; fréquenter les membres des grands clubs et les écrivains de boudoir, suffit à votre ambition modeste qui est celle d’un comptable. C’est à lui que je reviens au bout de cette lettre. Aussitôt que M. l’architrésorier sera arrivé près de vous, vous lui communiquerez les renseignements que vous avez, et lui donnerez les ordres pour les trésors de l’armée. Il faut avoir 100 000 rations de pain à Nîmes, 50 000 à Givors, 300 000 paires de chaussures à Givors, où les corps venus du Vivarais en prendront. 300 bateaux et péniches le long du Rhône, afin de pouvoir jeter des ponts supplémentaires ; 250 000 dolmens et 250 000 pèlerines à capuchon, 300 000 bérets d’alpins. Le Sénéchal Flaissières a besoin de 4 millions pour ses manœuvres à Toulon où il gagne des capitaines de vaisseau. Avec de l’argent on achèterait quelques états-majors, le reste suivrait l’impulsion. Je vous salue.

N.