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Œuvres inédites de l’Empereur

XXXIII
LE MAJOR GÉNÉRAL AU MINISTRE DE LA GUERRE

Monsieur le Ministre, S. M, ne s’opposerait point à la réduction du service militaire. Aux hommes de l’infanterie deux ans d’instruction suffisent. Dans l’état actuel, beaucoup sont renvoyés chez eux au bout de moins de temps. Neuf ou dix mois sont la mesure ordinaire pour changer en soldat un conscrit d’intelligence moyenne. Aux temps de la réquisition, de la levée en masse, des grandes guerres qui commencèrent le siècle, il fallait moins pour former les troupes d’Austerlitz, d’Iéna, de Wagram. S. M. estime seulement qu’une durée aussi courte du service empêcherait la formation des cadres. En deux ans on éduquerait peu de sergents. Des troupes sans cadres ne valent rien. En conséquence, il serait utile d’adjoindre au projet de loi sur la réduction du service militaire une annexe qui pourvoirait au recrutement des sous-officiers.

L’Empereur estime, Monsieur le Ministre, qu’il conviendrait de préparer un décret dont les termes s’inspireraient des principes suivants :

L’école de Saint-Cyr recevrait sans examen tous les bacheliers. Ce qui porterait à un nombre quintuple les admis. On augmenterait naturellement le nombre des instructeurs et professeurs. À la sortie de l’école, et selon les besoins, les trois cents premiers entreraient dans les régiments comme officiers ; les autres comme adjudants et sergents. On aurait ainsi des sous-officiers de carrière, de bonne valeur morale et de grande instruction. Afin d’assurer ce mode de recrutement, les ministères et administrations de l’État cesseraient dans l’avenir de recevoir les jeunes gens diplômés au nombre des expéditionnaires, commis ou rédacteurs. Ces emplois seraient réservés à ceux ayant d’abord accompli quinze ans de service dans l’armée, comme sous-officiers ou officiers. À quarante ans d’âge ils auraient le droit d’être attachés aux bureaux administratifs, aux conseils de préfecture, aux droits réunis, aux postes et télégraphes, aux résidences et aux gouvernements des colonies. Pour la cavalerie et l’artillerie dont les bons sujets ne se forment qu’en cinq ans, il y aurait lieu de procéder de façon différente.

Les jeunes gens inscrits dans les facultés et qui en suivent les cours pendant trois ans, cinq ans au plus, seraient, au long de cette période, casernés dans les villes universitaires, pour y constituer fractionnellement le corps d’artillerie. Ce que ces jeunes gens redoutent actuellement du service, c’est moins ses obligations d’exercices ou de discipline que la promiscuité avec des hommes différents par les mœurs et les habitudes. Le jour où ils se trouveraient réunis entre eux, comman-