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Annecy. L’armée septentrionale remontera la vallée de la Meuse, en s’appuyant à la Forêt d’Argonne, où s’engageront sans doute de graves hostilités contre les forces capitalistes du plateau de Langres. Selon les événements, l’armée septentrionale marchera, dans la suite, sur Lyon ou sur Paris. La région de l’Argonne attirera donc l’attention particulière des géographes. Je vous prie de vouloir bien vous conformer en cela aux intentions de S. M. l’Empereur.

Le Major général, prince
de Neuchâtel


XIV
LE MARÉCHAL DU PALAIS AU MINISTRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE

L’Empereur trouve mauvais, Monsieur le Ministre, que vous ayez reconduit jusque la porte une sorte de giton perdu de mœurs, sous prétexte qu’il a de la voix. Personne n’ignore quel chantage permit à cet histrion de tirer des sommes d’un ancien président de la République en échange de lettres écrites par la fille de celui-ci. Il est honteux que le ministre représentant l’intellectualité française accueille publiquement un tel personnage, et avec une telle attitude. S. M. espère que cela ne se reproduira plus.

Le Maréchal du Palais
Caulaincourt


XV
L’EMPEREUR AU GÉNÉRAL BILLOT
21 janvier 1898.

Ne comptez point trop sur le jury dans l’affaire Zola. Je sais ce qu’il en est. Lorsque je voulus me débarrasser de Moreau et que pour cela je le fis mettre dans la conspiration Pichegru, il fallut envoyer quelqu’un vers ces drôles qui l’avaient acquitté au premier tour de vote. Un certain Lecourbe eut même l’impudence de demander à voir les pièces du dossier dans la Chambre des délibérations. On lui fit répondre que c’était inutile, qu’elles n’avaient pas encore pu être imprimées et qu’on les distribuerait après le jugement. Sept juges sur douze votèrent d’abord l’acquittement. Le président Hémart se vit contraint de leur dire : « Vous voulez mettre en liberté Moreau, il n’y sera pas mis ; vous forcerez le gouvernement à faire un coup d’État, car ceci est une affaire politique plutôt qu’une affaire judiciaire ; et il faut quelquefois des sacrifices nécessaires à la sûreté de l’État. » J’envoyai Savary qui en avait vivement fini, quelques mois avant, avec le due d’Enghien, à Vincennes. Il enjoignit au juge Thuriot de ne point laisser partir les jurés à dîner, et de les faire dîner céans, jusqu’à ce qu’ils eussent voté mieux. Pendant le dîner, il y eut beaucoup d’allées et venues grâce auxquelles on représenta à ces mauvais