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possible, timides de présenter jusqu’aux gencives. Leurs haleines fumaient dans la nuit…

Alors, dans le glacement de précoce sépulcre, dans le lugubre de cette nuit pleine de formes, dans l’épouvantable fuite du temps, il aurorait de paradisiaques rêves…

Terre promise ! Terre promise ! Inviolable nid mental des félicités humaines, ô verdoiements sous les arbres en fleurs, terre promise, ciel d’or, doux soleil, océan ! Démesurée turquoise, flots de diamants et de mercure, couleurs d’éblouissements, vision de flammes, évaporation de l’âme vers les arcs-en-ciel, étreintes d’immensités ! Terre promise ! Belle viande rouge, lait blanc, légumes verts, et joue à embrasser, fraîche ! du bon pain tendre ! Terre promise ! Rubans, soies miroitantes, musique de diable, luxe de royautés, ô bals, ô danseurs, ô soupers ! O petits joujoux, petites choses à aimer, bonbons, livres d’images ! Pays d’assouvissement… où l’homme, régénéré, oubliera le mot de misère…

Comme tu semblais proche aux misérables !

Eugène Morel
À suivre