[Le directeur du théâtre allemand de Prague, M. Angelo Neumann, a été en correspondance avec Richard Wagner, de 1876 à 1883. Cette correspondance se compose d’environ cent lettres que M. Angelo Neumann se propose de réunir et d’éditer prochainement. Il a bien voulu permettre, par anticipation, la reproduction de quelqaes-unes de ces lettres.
M. Neumann avait été, avec Auguste Fôrster, directeur du Stad Théâtre de Leipzig. L’Opéra fit de tels progrès sous cette direction que le maître de Bayreuth s’adressa de confiance à M. Neumann.
Un incident survenu pendant les préparatifs de la représentation de VAnneau du Nibelung provoqua la première lettre. L’Anneau devait être représenté pour la première fois à Berlin au Victoria-Théâtre, sous la direction de M. Neumann, lorsque celui-ci apprit que Wagner donnait dans le mouvement antisémite. Wagner, interrogé à ce sujet, lui répondit :]
Je suis bien loin de participer au mouvement « antisémite ». Je ferai paraître prochainement dans la Gazette de Bayreuth un article [1] le prouvant de telle façon, qu’il sera impossible aux gens intelligents de croire que j’y suis mêlé.
Croyez-moi : quittez Berlin et allez à Londres pendant les mois de mai et de juin. Cependant faites comme vous l’entendrez ; c’est votre affaire. Il serait vraiment drôle que notre commune entreprise tombât par suite des absurdités qui fleurissent actuellement à Berlin.
Avoir, par des malentendus stupides, les courtisans et les juifs
sur le dos, ce ne doit pourtant pas être la destinée de nos Nibelungs.
Je suis
Votre bien dévoué,
[On est souvent indécis sur la façon dont il faut interpréter Hagen dans le Crépuscule des Dieux. Voilà l’opinion authentique du Maître.]
Je suis très content de la démarche lourde de Hagen. Quand, au deuxième acte du Crépuscule des Dieux, il se tourne rapidement de Brunnhilde vers Gunther, il doit le faire avec la plus grande vivacité, ce qui de par la démarche lourde, sera d’autant plus hor-