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la vieille, vieille maison des morts, sur les bières et les crêpes noirs, sur les vieilles épitaphes et les monuments ! Mais quand toute image s’enfuirait de mon âme, je n’oublierai jamais le presbytère chéri, car des rêveries puissantes l’ont gravé dans mon âme. La demeure ne fut construite qu’en 1820 ; aussi était-elle disposée avec beaucoup d’élégance. Plusieurs marches conduisaient au rez-de-chaussée. Je puis me souvenir encore de la salle d’étude au premier étage : les rangées de livres, parmi lesquels de nombreux ouvrages illustrés, faisaient de ce lieu l’une de mes places de prédilection. Derrière la maison se déployaient le verger et la prairie, dont une partie était d’habitude inondée au printemps, et ordinairement la cave était alors immergée aussi. Devant l’habitation s’étendait la cour, jusqu’au jardin-fleuriste, sous les berceaux, sur les bancs duquel je me reposais presque toujours. Derrière la haie verte étaient les quatre étangs, entourés d’oseraies. Aller entre ces pièces d’eau, voir jouer sur ce miroir les rayons du soleil et aussi les poissons fringants, cela était mon grand plaisir. Je dois rappeler quelque chose encore, qui m’emplissait d’un frisson intime : c’était dans la sombre sacristie de l’église — sur l’un des côtés se dressait l’image surhumaine de saint Georges, creusée dans la pierre par une main habile. Sa forme sublime, ses armes terribles et le mystère de la demi-obscurité soulevaient mes terreurs…


Deuxième fragment.


[Voici maintenant le dernier feuillet d’un journal de nietzsche, à la date du 20 octobre 1859.
Il venait d’avoir quinze ans.]


Je suis maintenant bien différent de ce que j’étais lorsque j’écrivis ce qui précède[1]. Alors verdoyait et s’épanouissait la fin de l’été — maintenant, hélas ! c’est la fin de l’automne. Alors, j’étais en quatrième, maintenant j’ai avancé d’une classe. Alors maman et Lisbeth étaient encore à Naumbourg, etc.

J’ai dépassé ma fête de naissance et je suis devenu plus vieux — le temps passe comme la rose du printemps, et le caprice comme l’écume du ruisseau.

Me voici saisi d’une ardeur singulière pour la science, la culture universelle ; Humboldt a stimulé cette tendance en moi. Puisse-t-elle être aussi durable que mon goût pour la poésie !

J’ai eu dès la plus tendre enfance mes chevaux de bataille ; ce furent d’abord les fleurs et les plantes, manteau de la terre. Mais je ne sais cela que par tradition.

  1. Nietzsche n’avait rien écrit depuis le 11 septembre dans son journal.