Il y eut un procès, où elle parut comme témoin. On avait, paraît-il, empoisonné le seigneur. L’intendant fut envoyé en Sibérie, où elle s’empressa de le rejoindre. On n’a plus eu de ses nouvelles.
— Comment résumeriez-vous les causes de la chute de la Commune ?
— N’avoir pas occupé le Mont-Valérien, avoir attendu au 3 avril pour marcher sur Versailles, furent les fautes capitales du début. L’ingérence du Comité central dans les affaires après les élections, le manifeste-scission des vingt-deux de la minorité (15 mai), la manie qu’eut la Commune de légiférer, alors qu’il fallait combattre et préparer la lutte finale, furent des germes de défaite. Et une fois Versailles dans Paris, la défaite fut hâtée par la proclamation de Delescluze du 22 mai, flétrissant toute discipline, par la dispersion des membres de la Commune dans leurs quartiers (la défense était désormais décapitée), par la presque inaction du parc d’artillerie de Montmartre, par l’incendie de l’Hôtel de Ville. Avant le 21 mai, jour de l’invasion, rien ou presque rien n’avait été fait pour la défense des rues. On avait offert 3 fr. 75, aux terrassiers, aussi n’en avait-on pas trouvé. Des terrassiers, la Commune en eut pour rien, elle en eut tout un peuple, aux heures tragiques mais il était un peu tard. Il eût fallu deux cents barricades préméditées, stratégiques, solidaires, que dix mille hommes eussent suffi à défendre sans fin. On en eut des centaines et des centaines, mais sans coordination et impossibles à peupler. Hélas la Commune n’avait pas prodigué l’argent pour sa défense. Sa munificence s’était haussée aux trente sous quotidiens des gardes nationaux. Il eût fallu peser sur M. Thiers en saisissant le gage de la Banque de France. Pas d’argument plus décisif. Au surplus, il y avait à la Banque, entre autres richesses dociles, des billets bleus, valeur 900 millions, qui pour entrer en circulation n’attendaient plus qu’une griffe. Il est vraiment triste qu’on ne l’ait pas trouvée au cours d’une insurrection qui comptait tant d’ouvriers d’art.
… De la droite des boulevards, venait à nous une rumeur encore lointaine, intense, profonde. Cette rumeur grossissait d’instant en instant en se rapprochant et le crescendo éclatait bientôt sous nous. Il se passait assurément quelque chose extraordinaire.
Les personnes qui se trouvaient dans l’appartement coururent toutes aux fenêtres. Malade et même, sans m’en douter, depuis deux grands mois condamné par les médecins, je m’y traînai dernier par une contagion de curiosité malsaine qui se trouva punie.
Après tant de douleurs, de tristesses, d’horreurs, voici donc ce qu’il m’était réservé de voir et réservé d’entendre, en plein centre de Paris, centre de la civilisation humaine…