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central réparèrent inconsciemment la faute commise par Thiers et ses complices, et leur permirent de préparer les assassinats de la semaine sanglante.

M. Faillet
pendant la Commune, s’était chargé avec Combault du service des contributions directes. Il est actuellement conseiller municipal de Paris.

… À vrai dire il n’y a pas encore eu de révolution ; de celle qui viendra… ou ne viendra pas, le 18 mars n’est qu’un prologue.

M. Giffault
actuellement rédacteur à l’Intransigeant.

— J’avais alors vingt ans. Je connaissais Rigault, ayant été arrêté avec lui et Humbert, sous l’Empire à la Marseillaise. Le 19 mars, avec Dereure, je descendis de Montmartre à la préfecture de police où nous trouvions Duval qui, en bon blanquiste, avait immédiatement songé à elle et s’en était emparé la veille. Le 20, Rigault s’y installait. Très épris de l’hébertisme, dont son ami Tridon était l’historien, Rigault rêvait depuis longtemps le rôle de procureur de la Commune. Au moment où il m’invita à rester avec lui, tout était en tohu-bohu, les bataillons couchaient dans les corridors. On essaya de mettre un peu d’ordre — d’autorité ! — on reconstitua une sorte de hiérarchie ; on institua des agents de police municipale ; les bureaux s’organisèrent, on rétablit le dispensaire…

— Et les mouchards de l’Empire ?

— Nous avions entre les mains les Archives du Cabinet instituées par le préfet Gisquet, recueil des rapports de police fournis par les agents secrets dont Lagrange était le chef sous l’Empire et Clément le sous-chef. Nous consultons nos dossiers personnels et bientôt généralisons nos recherches. Lagrange, en s’en allant, avait brûlé les fiches qui donnaient la clef des pseudonymes dont étaient signés les rapports. Reconstituer, grâce à des reçus oubliés par Lagrange, à une comparaison d’écriture et à divers autres indices, l’identité des mouchards, ce fut un travail d’ingéniosité que nous n’eûmes pas le temps de finir, mais qui nous permit de démasquer quelques drôles : entre autres le major Wolff, sur qui on ne put mettre la main. Cet individu, condamné à mort en Italie pour faits politiques était un ami de Mazzini, de Garibaldi, de Victor Hugo et de tous les proscrits de 1851, qu’il dénonçait d’ailleurs de Londres dans ses rapports quotidiens pour lesquels il était assez grassement payé. Il passait pour honnête et brave, grande fut donc la désillusion lorsqu’on apprit dans le parti républicain qu’il n’était