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des généraux et nourri le sot désir de rentrer, triomphateur, à Paris, rien ne lui eût été moins difficile. Il ne souhaita point ce misérable privilège. Au contraire, lors de l’expédition française en Chine, il édicta des décrets sévères interdisant toute imprudence capable de révéler l’empire mystérieux et déjà prospère. Telle fut son autorité, que nul ne transgressa les prescriptions ni ne tenta le retour en Europe, spontanément. Des émissaires y furent envoyés à bien des reprises pour les intérêts publics, sans que leur parole trahit le secret.

Peut-être le climat d’Asie favorable pendant le cours des histoires, au succès des autocraties absolues, modifia-t-il le caractère des pionniers, peut-être l’infiltration des races autochtones sut-elle insinuer aux conquérants le respect du destin qui impose la volonté d’un roi à des millions d’hommes. Il persiste en tous cas, aux yeux et aux allures des êtres, une singulière langueur. Leurs paupières semblent alourdies par la résignation ; leur sourire erre avec indulgence et scepticisme. Peu de choses les émeuvent. Que les gens, dans la rue, s’accouplent sur les divans de pierre installés au fond des arcades bornant les nombreux squares à vasques et à jets d’eau : que, même, l’élan d’un haut tramway coupe en deux le corps d’une personne imprudente ; cela ne suffit point à les détourner beaucoup du rêve intérieur. Une expression de dédain s’esquisse à peine sur leurs visages, pour le premier spectacle, et, pour le second, leur moue marque plus de dégoût procuré par le gâchis sanglant que de commisération envers la victime.

Je ne puis vous dire à quel point ce caractère agace nos impétueuses habitudes de participer à toutes les manifestations de l’existence chez autrui. Théa et Pythie, mes compagnes, finissent par me désoler. Je me sens prêt à les haïr. Si je leur parle de nos littératures, de notre politique, elles m’écoutent sans répondre, évidemment ennuyées. À mes interrogations elles ne manquent pas de satisfaire, mais sans que leur verbe s’anime pour exalter la merveille de leurs inventions, ou pour en dénigrer les abus. Elles ne s’enchantent pas de franchir avec tant de célérité l’étendue, ni de jouir des très beaux décors que font les villes. Elles ne se plaignent pas de cette vie tout ouverte qui les oblige à quitter leurs habits à la porte de la piscine précédant les salles de repas, pour en revêtir d’autres, de nouveaux, d’inconnus, imposés par l’administration. Tout leur venant à point, le sens de la lutte s’est perdu. Elles ne désirent rien avec assez de violence pour agir dans un espoir. La vie leur semble dénuée de valeur. Naguère je risquai de me tuer au sortir d’un ascenseur. Cela ne les fit point sourciller même. Bien que les rapports intimes de la sexualité me lient à l’une et à l’autre, maintenant, elles ne me confient pas de leurs gaietés ou de leurs craintes. Nous demeurons aussi étrangers qu’à la deuxième heure de la rencontre. Ici, chacun reste un passant pour chacun.

Figurez-vous que cette Pythie me passionne presque. Le charme intelligent de son silence, les cruautés de sa débauche et la supériorité de son mépris m’éblouirent. Son corps fatigué dégage des odeurs qui étourdissent. Il vous enlace de douceurs,