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sophie grecque de la pensée moderne. On retrouve en effet le besoin d’universalité chez Descartes et chez tous les grands penseurs qui l’ont suivi. Pour Descartes, comme pour Aristote, la philosophie embrasse toutes les sciences et les domine : « C’est une parfaite connaissance de toutes les choses que l’homme peut savoir,dit-il dans la Préface des Principes de la Philosophie,…,… mais pour que cette connaissance soit telle, il est nécessaire qu’elle soit déduite des premières causes. »

Il faut donc chercher ailleurs ce qui fait l’originalité de la pensée philosophique chez les Grecs ; ce quelque chose de spécial et de vraiment caractéristique, il semble qu’on pourrait le trouver dans la façon dont les penseurs grecs ont conçu la science, et, pour l’avoir nettement formulée, il y a avantage à s’adresser à Aristote. En effet, si ce dernier est à ce point de vue, l’héritier fidèle de Platon, il n’est pas en contradiction non plus avec ceux qu’il appelle phusikoi désignant ainsi les philosophes anti-socratiques. De même, bien que le but de la science ne soit modifié avec les Épicuriens et les Stoïciens et qu’elle soit devenue toute pratique, la conception que ces deux écoles se sont faite de la science en tant que science ne diffère pas sensiblement de celle que nous trouvons chez Aristote. — Enfin ce dernier a apporté des formules très précises qui permettent de voir en quoi cette idée de la science s’oppose à celle que nous trouvons chez Bacon, par exemple.

La science, pour Aristote, n’a pas d’autre fin qu’elle-même. La science la plus parfaite et la meilleure est celle à laquelle on s’applique pour elle-même, en dehors de toute vue utilitaire. Savoir est l’acte par lequel nous nous rapprochons le plus de la divinité qui seule a le privilège inestimable de savoir sans cesse et de se contempler éternellement. — ôst’ ékeino mallon tónton ò dokeî ò nous theîon échein, kai é theôria tò êdiston kai áriston — Ainsi la contemplation est le seul but que doit se proposer la partie divine de l’intelligence ; elle apprend à connaître le monde et recherche les rougas de l’Univers pour avoir ce bonheur