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panta rei d’Héraclite et les négations des sophistes avec lesquels on peut terminer ce premier moment de la philosophie, ont ce bon résultat d’amener une plus grande prudence dans les recherches, et le désir d’un point de départ mieux assuré pour l’esprit s’élançant à la conquête de la vérité.

C’est avec Socrate que commence une nouvelle ère de la pensée en Grèce, une orientation plus précise de la spéculation. Le problème philosophique change de position. On ne se demande plus quelle est la substance de l’univers, mais bien : qu’est-ce que je puis savoir avec certitude ?

La réflexion est ramenée du monde extérieur où elle s’égarait sans principes et sans méthode, à l’observation du sujet qui seul peut lui donner ces principes, vainement cherchés au dehors. Le gnôthi seauton marque ce changement important, et, si l’on veut mesurer les conséquences qu’il a eues dans la façon dont s’est posé depuis le problème philosophique, il est facile d’y rattacher les spéculations de la presque universalité des penseurs qui ont suivi. À l’envisager ainsi le gnôthi seauton a la même importance dans l’histoire de la pensée en Grèce que le Cogito ergo sum de Descartes dans le développement de la philosophie moderne. Platon et Aristote, les Épicuriens, comme les Stoïciens demandent à la raison et non plus à la nature l’explication des problèmes qu’ils se posent. C’est ce qu’il y a d’intelligible dans les choses qui devient le but de la spéculation. On veut trouver les principes et les causes, árchai kai aítiai, La période philosophique qui s’ouvre ainsi a pour caractéristique la recherche de l’élément fixe et permanent dans les choses particulières et accidentelles, de ce qui entre comme principe constitutif dans l’idée. On peut définir cette phase nouvelle en la dénommant : la Philosophie du concept.

La troisième et dernière période ne présente pas les caractères très nets des deux premières. — À la suite du bouleversement politique et religieux du monde antique, les cadres de la philosophie ancienne sont brisés. Les influences orientales et chrétiennes apportent un esprit nouveau dans la spéculation. Le Néoplatonisme aboutit à un mysticisme,