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tous les immeubles. Le roi y a le droit de défendre toute pratique contraire à la religion de l’Etat ; il est défendu à des sociétés différentes de se fusionner ou de rassembler leurs délégués respectifs. On va plus loin dans le détail et on détermine la façon de voter[1], de même qu’en Grèce où l’on force les électeurs à émettre leurs suffrages au moyen de boules.

Et toutes ces dispositions qui pourraient figurer dans des lois, sont constitutionnelles, c’est-à-dire que pour y déroger, il faudrait se soumettre aux formalités sans nombre qu’exige une révision !

Mais le danger des Constitutions réside surtout en ce qu’elles sont opposées au progrès. Telle est la reconnaissance des religions d’État qui existent encore entr’autres pays en Angleterre, en Espagne, en Italie et en Danemark ; ce qui constitue, malgré les autres garanties, une grave atteinte à la liberté de conscience. Telle est aussi la fixation du nombre des députés qui est établie à l’exclusion de la représentation proportionnelle en Autriche, aux Pays-Bas, et en France pour les élections au Sénat, dont on a fixé le nombre des membres à 300, en indiquant même les départements qui doivent les élire. La situation inique des Bourgs pourris en Angleterre et les difficultés qu’on a éprouvées pour les supprimer, sont assez éloquentes pour qu’il ne soit pas nécessaire d’insister sur les dangers d’une telle situation. Dans d’autres pays, on peut être éligible sans être électeur ! Tels sont la Belgique et le Grand-Duché de Luxembourg où le cens est nécessaire pour avoir droit de vote aux élections législatives, alors qu’il n’est pas exigé pour devenir député, et en Danemark où on est éligible au Folketing à 25 ans, mais où on ne peut voter avant 30 ans !

Mais laissons de côté ces chinoiseries. Combien de pays sont encore soumis au suffrage restreint ! La Constitution française de 1830 et celle de Bavière de 1818 laissaient encore une certaine liberté à la loi pour délimiter les classes d’électeurs. Mais en Autriche, en Italie, en Belgique, etc., c’est la Constitution elle-même qui détermine les conditions de cens. Et à ces institutions qui, dès aujourd’hui, sont en contradiction manifeste avec l’état des esprits et les conditions sociales des peuples, on oppose des moyens de révision presque impossibles[2].

  1. Constitution du Royaume-Uni. Art. 133. “ Au jour fixé pour l’élection, les candidats, ainsi que les membres des Comités qui les appuyent, prennent place sur les plates-formes couvertes sous la présidence du returning officer… ”
  2. En Autriche, il faut les deux tiers des voix. En Belgique, en Hollande et en Luxembourg, les Chambres doivent émettre un premier vote en faveur de la révision, après quoi elles sont dissoutes ; les nouvelles Chambres qui sont convoquées ne peuvent prendre de résolution, que si les deux tiers des membres sont présents et si les deux tiers des suffrages sont favorables à la révision. En Portugal, on doit procéder à trois lectures du projet qui doit être mis en discussion, sanctionné et