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florentine

— Quand ça ?

— Demain…

Florentine pousse un cri. Sourcilleux lui a saisi le bras et le serre de toute sa force.

— Tu ne par-ti-ras pas !… Je te casserais la tête plutôt !

— Vous ne casserez rien ! s’écrie le brigadier, qui vient de sauter par-dessus la table et qui s’interpose. D’abord, on ne bat pas les dames. En voilà des manières !… Voulez-vous lâcher madame !… À la bonne heure… Et tâchez de vous rappeler que madame est libre.

— Oui, oui ! je suis libre ! hurle Florentine. Et je te le ferai voir, vieux salaud ! Moi qui prenais des gants pour lui annoncer la chose, afin de ne pas lui faire de peine. Et il me bat ! Vrai ! on serait marié, ça ne serait pas pire !… On n’est pas marié, peut-être ?

Sourcilleux semble stupéfait, ahuri. Il répond en ouvrant les mains :

— Ça, non, on n’est pas marié…

— Alors, je vais faire mes malles.

Elle disparaît derrière le rideau de cretonne et l’on entend un grand bruit d’étoffes froissées, de choses bousculées, heurtées, empilées dans des coffres. Sourcilleux qui est resté, tout pâle, à la place où Florentine l’a quitté, veut pénétrer dans le réduit derrière elle. Mais le brigadier le saisit au collet :

— Je vous défends d’aller par là.

— Vous me défendez !… Sacré bon Dieu !…

Il se dégage, d’un mouvement brusque, et, s’avan-